Quatre ans après que les artistes pour la paix Dominic Champagne, Gilles Vigneault et le regretté Frédéric Back eurent rallié le 22 avril 2012 un quart de million de protestataires sur le Mont-Royal, voici une plus modeste contribution.

Mise à jour le 22 avril

Aussitôt publié, notre document dont nous sommes très fiers est devenu périmé avec l’annonce de la suspension des audiences du BAPE.

Énergie Est a fait l’annonce qu’elle acceptait dorénavant de soumettre son projet aux normes environnementales du Québec.

Étrange, n’est-ce pas, que cette annonce survienne au surlendemain de la date-limite de soumission des mémoires au BAPE. La compagnie s’est-elle aperçue qu’elle n’avait AUCUNE chance de sortir vivante de ces audiences avec une acceptabilité intacte ???

Donc, nos mémoires seront à retoucher…

Ce 22 avril marque aussi la signature de 175 pays à l’ONU de l’accord sur le climat. M. Ban Ki-moon se réjouit à juste titre et nous participons, avec le premier ministre Trudeau, à l’allégresse devant ces signatures-records ! Maintenant, combien de pays RATIFIERONT cet accord, vu le hiatus entre les belles intentions et la sombre réalité soulignée dans nos mémoires ? 2020 verra à coup sûr une réévaluation des actions gouvernementales face aux cibles qui seront non atteintes…

Jour de la Terre 2016 au parc Lafontaine, Montréal. Photo Daniel Gingras

Jour de la Terre 2016 au parc Lafontaine, Montréal. Photo Daniel Gingras

Enfin, aujourd’hui JOUR DE LA TERRE 2016, nous nous réjouissons de l’annonce du projet intelligent de RÉSEAU ÉLECTRIQUE MÉTROPOLITAIN, malgré son penchant de desservir avec avantage la population anglophone de l’ouest métropolitain et banlieusard.
Notre deuxième mémoire faisait de l’électrification des transports une action incontournable à entreprendre pour réduire les émissions de GES !

Florence Junca-Adenot, ex-PDG de l’ATM, se réjouit d’y voir repris un projet qu’elle poussait en l’an 2000. Hélas, le gouvernement rétrograde Harper a empêché pendant une décennie tout projet favorable à la lutte aux changements climatiques d’émerger, faute de fonds.

On a donc seize ans de retard, mais la Caisse de Dépôt et Placement investit pour que le projet se réalise, avec l’enthousiasme du maire Coderre en prime.


Mémoire des Artistes pour la paix

présenté dans le cadre des consultations du BAPE
sur le projet oléoduc Énergie Est – section québécoise

Par les APLP Isabelle Miron et Marie Saint-Arnaud

derouin_bape

René Derouin, Constellation XI – Série Fleuve-Mémoire 1994-2014
Linogravure rehaussée d’aquarelle, 38cm X 28cm, 2014
Photo : Lucien Lisabelle

Les Artistes pour la paix, qui comptent près de 700 membres et sympathisants, tiennent à se joindre au mouvement de protestation contre le projet Énergie Est de transport du pétrole lourd en provenance des sables bitumineux de l’Alberta, puisqu’il constitue sous plusieurs angles une atteinte directe à la paix sociale et à la paix entre les peuples du monde. Puisque cette atteinte à la paix interpelle directement l’engagement et la mission des APLP, nous souhaitons attirer l’attention de la Commission d’examen du BAPE sur cette problématique, et cela tant sur le plan environnemental, humain que géopolitique.

Dans ce mémoire, nous allons:

  1. présenter sommairement les APLP ainsi que notre mission et notre engagement dans les dossiers environnementaux;
  2. expliquer l’atteinte à la paix sur le plan environnemental;
  3. sur le plan social;
  4. sur le plan humain;
  5. sur le plan de la géopolitique mondiale;
  6. et conclure avec notre vision de l’art comme arme de construction massive.

 

1  Présentation des Artistes pour la Paix

Les APLP voient le jour à Montréal en 1983 sous l’égide de l’organisme international Performing Artists for Nuclear Disarmement. La mission des APLP s’articule autour de la promotion de l’idéal d’une paix durable, obtenue pacifiquement, en misant sur le désarmement, l’éducation, la justice sociale, le rejet de toute forme de discrimination, l’ouverture à l’autre, le féminisme, le respect de la nature et l’engagement envers l’Art vu comme vecteur de Paix.

La mission des Artistes pour la Paix se décline en sept mandats relatifs à la paix et les arts. Les APLP appellent à protéger la nature contre les assauts répétés des projets industriels, miniers (amiante) et pétroliers dommageables, telle la construction du pipeline TransCanada favorisant le transport du pétrole des sables bitumineux.

Les APLPaix se sont alliés par le passé à de nombreux groupes citoyens et écologistes qui ont fait reculer le gouvernement dans sa volonté d’exploiter les gaz de schistes dans la vallée du Saint-Laurent. Également, il ont participé à la Marche des peuples pour le climat à Montréal (21 septembre 2014), à la marche 100% possible à Ottawa (29 novembre 2015), la marche à Cacouna contre le projet de port pétrolier (11 octobre 2014) et enfin à la marche à Sorel contre le pétrole des sables bitumineux (26 octobre 2014).

Enfin, à chaque année, les APLP décernent le Prix de l’artiste pour la paix. Cette année, les APLP ont voulu souligner l’engagement pour la paix et la protection de l’environnement de l’artiste anishnabe Samian. Cet artiste multidisciplinaire fait aussi partie d’un jury présidé par Louise Arbour qui sélectionnera 40 personnalités engagées pour le 40e anniversaire de la Charte des droits et libertés de la personne.

2  Atteinte à la paix sur le plan environnemental

Sur le plan environnemental, le projet Énergie Est constitue une atteinte à la paix car il découle directement de la destruction de l’écosystème nord-albertain. L’exploitation des sables bitumineux de l’Alberta est considérée comme un des pires écocides [1] au monde. À ce chapitre, un mouvement mondial qui a vu le jour en 2010 veut faire reconnaitre le crime d’écocide au niveau du droit international comme un crime contre la paix et l’humanité [2]. Le Mouvement Endecocide présentait d’ailleurs au Président Hollande un appel en ce sens au cours de la Conférence de Paris sur les changements climatiques en décembre 2015. Particulièrement au Québec, le projet Énergie Est constitue un risque d’écocide supplémentaire puisqu’en traversant 860 cours d’eau, le pipeline menace directement les sources d’eau potable de plus de trois millions de Québécois [3]. De plus, tel que souligné par le professeur en écotoxicologie, Émilien Pelletier, lors de son passage devant le BAPE en mars dernier, un déversement de bitume dilué dans le fleuve Saint-Laurent en hiver, en présence de glaces mouvantes, serait presque catastrophique en raison des difficultés d’intervention. Enfin, le projet de TransCanada aurait une conséquence directe sur les changements climatiques puisqu’il augmenterait de 30 à 32 millions de tonnes de GES les émissions de l’industrie des sables bitumineux, soit l’équivalent d’un ajout sur nos routes, de 7 millions de voitures. Le Gouvernement du Québec doit prendre acte de sa part de responsabilité face aux lourdes conséquences environnementales et humaines de la hausse des températures du globe de plus de 2 degrés par rapport à la période pré-industrielle. Pour toutes ces raisons qui touchent la destruction de notre environnement, les APLP considèrent le projet Énergie Est comme un crime contre la paix et contre l’humanité.

3  Sur le plan social

Sur le plan social, le projet Énergie Est constitue une atteinte à la dynamique démocratique du Québec. En effet, en refusant de soumettre un avis de projet au Ministère de l’Environnement pour se conformer à la loi sur la qualité de l’environnement du Québec, TransCanada contourne nos institutions politiques, ce qui constitue un acte de violence symbolique. De plus, les consultations menées par la Communauté Métropolitaine de Montréal (CMM) montrent qu’il n’y a pas d’acceptabilité sociale pour ce projet. Les consultations publiques ont conduit les 82 municipalités qui forment la CMM à s’opposer au projet Énergie Est en janvier 2016. En ce sens, il s’agit d’un non-respect de la volonté populaire.

4  Sur le plan humain

Sur le plan humain, les projets d’oléoducs représentent un risque significatif pour les autochtones du Québec, qui, en raison de leur lien privilégié à la terre et au territoire, sont directement concernés par les risques environnementaux et particulièrement vulnérables aux changements climatiques, sans compter le fait que les régions nordiques sont déjà touchées de plein fouet par l’augmentation globale des températures. Le Gouvernement du Québec continue de faire la sourde oreille aux inquiétudes manifestées par l’Assemblée des Premières Nations du Québec et du Labrador, le Conseil Mohawk de Kanesatake et d’autres membres des Premières Nations qui se sont exprimés en ce sens. Conséquemment, les APLP considèrent que tant que le Gouvernement du Québec n’aura pas consulté les Premières Nations en bonne et due forme, le projet constitue une atteinte à leurs droits ancestraux constitutionnels et un refus d’obtempérer au principe du consentement libre préalable et éclairé tel qu’établi par la Cour suprême du Canada dans le jugement Tsilhqot’in (2014, SCC 44). Notons également que la Cour suprême de Colombie-Britannique a statué en janvier dernier que la province avait «porté atteinte à l’honneur de la Couronne» en ne consultant pas les Premières Nations au sujet du projet du pipeline Northern Gateway de la compagnie Enbridge. Les Premières Nations se considèrent à juste titre les «otages économiques du Canada [4]» et des multinationales pétrolières, ce qui constitue également un cas d’injustice environnementale puisque qu’il fait porter à une frange défavorisée de la population la majeure partie des risques associés au problème environnemental que soulève le projet Énergie Est. Par conséquent, les APLP considèrent qu’en matière de consultations des autochtones, le projet de TransCanada et la position du Gouvernement constituent une entrave importante à la paix et à la cohésion sociale au Québec.

5  Sur le plan de la géopolitique mondiale

Sur le plan de la géopolitique mondiale, les risques guerriers engendrés par l’économie pétrolière mondiale sont avérés, et les APLP se sont positionnés à plusieurs reprises sur ces enjeux [5] . Sans conteste, le projet de TransCanada s’inscrit dans ce paradigme de l’économie du pétrole aux retombées destructrices. En effet, depuis les empires pétroliers bâtis entre les deux grandes guerres jusqu’à l’intensification récente du terrorisme financé par le pétrole irakien, en passant par les guerres du Golfe (1990 et 2002), le marché du pétrole qui domine l’économie mondiale a été un instrument de destruction massive et d’inéquité sociale. À l’inverse, la communauté internationale s’est engagée à décarboniser l’économie mondiale lors de la rencontre de la COP21 en décembre 2015. L’Accord de Paris constitue un exemple de solidarité des peuples autour de l’objectif commun de limiter la hausse des températures globales sous la barre des 2 degrés Celsius. Le Québec, en s’engageant dans le projet Énergie Est, se désolidarise de la communauté internationale, ce qui constitue un recul envers la justice climatique à l’échelle planétaire.

6  Conclusion

Pour toutes ces raisons, les APLP sont résolument engagés dans l’appui au principe de la transition énergétique et dans la lutte aux changements climatiques. Depuis l’annonce du projet Énergie Est et la construction d’un port pétrolier à Cacouna, les APLP ont été de toutes les manifestations pour faire reculer ce projet, comme nous le signalions en introduction, et sont à ce titre également signataires du manifeste Élan global et de Un Bon vers l’avant. Le territoire québécois et en particulier le fleuve Saint-Laurent ont constitué une inspiration pour plusieurs générations d’artistes québécois, de Gilles Vigneault à René Derouin, en passant par Gatien Lapointe, Richard Séguin, Domlebo, Natasha Kanapé Fontaine, Joséphine Bacon, Michel Rivard, Félix Leclerc et bien d’autres encore.

« Le fleuve qui coule entre la rive nord et la rive sud, entre l’intérieur des terres et l’océan, entre notre passé le plus ancien et notre avenir, est non seulement ce qui nous abreuve, mais aussi ce qui nous relie à nous-mêmes et nourrit notre imaginaire. Si une catastrophe se produisait, ce serait une perte irrémédiable de beauté et de mémoire. Abandonner le fleuve aux intérêts financiers à court terme, c’est compromettre la suite du monde. [6] »

Le Prix du fleuve ? (Lettre au Devoir, 23 août 2014)

En refusant Énergie Est, nous faisons un geste concret pour la paix dans le monde.

[1] Écocide: acte de destruction ou d’endommagement important d’un écosystème notamment par l’exploitation excessive de celui-ci.
Cf.: https://www.endecocide.org/examples/

[2] En 2010, la juriste britannique Polly Higgins proposait à la Commission du droit international des Nations Unies que le crime d’écocide devienne le cinquième crime contre la paix, au côté des crimes contre l’Humanité ou des crimes de guerre.
Cf.: http://reporterre.net/Les-crimes-contre-la-nature-sont

[3] Environmental Defence Canada (avril 2016). “Énergie Est: une menace à l’eau potable”.

[4] Daniel T’seleie, Membre de la communauté Déné.
Cf: http://www.no-tar-sands.org/2015/12/indigenous-communities-and-european-allies-take-action-on-total-in-paris-during-climate-talks/
http://www.declarationuniverselledesdroitsdelaterre.org/fr/FAQ.html

[5] http://www.artistespourlapaix.org/?s=pétrole+guerre

[6] http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/416635/port-petrolier-le-prix-du-fleuve
Lettre au Devoir de Yvon Rivard et Isabelle Miron, co-signée par 400 personnes.


 

Présentation au BAPE

Dossier Énergie Est

Par Derek Paul et Pierre Jasmin (courts cv à la fin de l’article)

Remarques préliminaires

En décembre 2015, les dirigeants mondiaux réunis à Paris pour discuter des changements climatiques s’entendent, pour la première fois depuis l’échec de Kyoto, sur un processus politique global. Il s’agit de réduire les émissions de gaz à effets de serres selon un échéancier pour sauver la planète d’un réchauffement climatique échappant à tout contrôle. Car une proportion importante de savants croit notre monde en passe de basculer vers la disparition des calottes glaciaires et une élévation catastrophique du niveau des océans, donc une possibilité d’une décimation des êtres vivants qui pourrait excéder l’ampleur de l’extinction permienne. [1].

C’est pourquoi COP21 représente une étape critique du progrès humain, capable d’envisager et de combattre ensemble la plus grande menace connue à l’espèce humaine. L’insuffisance, toutefois, des cibles concrètes adoptées n’est pas sans rappeler les succès-échecs relatifs des dernières campagnes pour éliminer les seize mille bombes nucléaires.

Utilité indéniable du pétrole et du charbon

L’urgence, à laquelle les changements climatiques nous confrontent, résulte de la révolution industrielle, amenée par la disponibilité du charbon et du pétrole utilisés de façon extravagante comme combustibles depuis le début du XIXe siècle. La gloutonnerie néo-libérale les a ainsi gaspillés pour le bénéfice exclusif d’immenses profits industriels.

Contrairement à l’uranium aux usages nocifs, il n’y a aucune indication morale contre l’extraction du charbon et du pétrole, puisque de nombreux usages utiles en dérivent. Le pétrole, par exemple, baigne notre vie quotidienne : le nylon, les plastiques et le caoutchouc synthétique sont issus de polymères dérivés du pétrole. Les élastomères de polyuréthane très utiles pour isoler nos maisons représentent une manière écologique de lutter contre le gaspillage de carburants, surtout lorsque couplés à un programme ambitieux gouvernemental de géothermie (chère à Frédéric Back). Rappelons que l’article 2 de la loi sur le développement durable le définit comme « un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures à répondre aux leurs».

Si nos ancêtres avaient pu envisager les conséquences de leur gloutonnerie sur l’étendue d’un millénaire, auraient-ils consenti à sacrifier ces précieuses ressources à les brûler au lieu de les manufacturer ?

Le futur industriel

Il est important de se projeter dans un futur raisonnable afin d’empêcher un développement non-soutenable, par exemple en

  • assurant une agriculture viable, en empêchant les villes, les édifices, les routes etles stationnements d’empiéter sur de bonnes terres arables et en construisant des villes nouvelles sur des terres à pauvre rendement agricole;
  • améliorant le rendement agricole par des engrais de type biochar [2];
  • éliminant les OGM de type Monsanto, les produits chimiques et les insecticides qui polluent nos cours d’eau;
  • encourageant le développement de l’énergie géothermique pour le chauffage l’hiver de nos maisons et bureaux;
  • poursuivant l’exploitation d’énergie éolienne et solaire qui, selon Daniel Breton (conférence du 31 mars), devrait coûter d’ici cinq ans aussi peu cher que l’hydroélectricité québécoise qui fait déjà de nous une société privilégiée dans le monde;
  • favorisant un réseau étendu de trains électriques et de trolleybus [3];
  • implantant des bornes de recharge pour favoriser l’automobile électrique;
  • favorisant le covoiturage et les véhicules électriques en auto-partage Communauto, Téo-Taxi …;
  • espérant voir le parti démocrate réélu aux États-Unis pour qu’il continue à exercer la pression gouvernementale sur les constructeurs d’automobiles, de VUS et de camions pour qu’ils diminuent leur consommation de carburant (essence et diésel).

 

Priorité d’éliminer le gaspillage

Hélas, le système économique néo-libéral avec sa quête désespérée de profit immédiat, a brûlé une quantité phénoménale de pétrole comme carburant, sans diminuer la consommation de charbon par les États-Unis et la Chine en vue de produire de l’électricité, deux activités extravagantes en ce sens que l’efficacité thermique de ces moyens en conversion à l’électricité ou à la propulsion d’un moteur est minime.

Or, la menace du changement climatique, qui évolue à un rythme alarmant, fait de l’élimination de la combustion du charbon et du pétrole une priorité vitale pour la race humaine. Le projet de TransCanada, en particulier, aurait une conséquence directe sur les changements climatiques puisqu’il augmenterait jusqu’à 30-32 millions de tonnes de GES les émissions de l’industrie des sables bitumineux, soit l’équivalent d’un ajout sur nos routes de 7 millions de voitures à essence.

Pipeline or not to be

La construction de l’oléoduc TransCanada signifierait une persistance obstinée d’aggraver la pollution qui a ravagé notre planète au point où l’océan perd rapidement de son caractère alcalin et qu’un point de non-retour climatique semble difficilement évitable. En ce sens, le pipeline fait partie d’un dessein suicidaire.

La compagnie Irving Oil, basée à Saint John, au Nouveau-Brunswick, opère la plus grande raffinerie de pétrole au Canada, transformant 320,000 barils par jour, incluant un tiers importé des États-Unis, un tiers du Canada de l’ouest véhiculé par rails et un tiers importé d’Arabie saoudite. M. Whitcomb, pdg d’Irving Oil, assure qu’il maintiendra l’importation de ce dernier tiers par d’immenses tankers par simple souci de diversification, et ce MÊME AU CAS OÙ ÉNERGIE-EST SERAIT BÂTI.

Pourquoi les investisseurs et le gouvernement fédéral n’encourageraient pas l’Alberta et la Saskatchewan à se doter, plutôt que de pipelines, d’usines de transformation de pétrole en produits finis utiles à tous ? On essaie de justifier la construction d’un pipeline comme une mesure temporaire à court terme de favoriser l’utilisation de pétrole jusqu’à ce qu’on atteigne une société sans émissions de gaz à effets de serres. Peut-on envisager sans trop de naïveté de remplacer l’argent investi dans un pipeline par des alternatives à la fois plus créatives et enrichissantes ? Les investisseurs, plutôt que d’être frustrés par l’abandon de leur projet de pipeline, ne se réjouiraient-ils pas à l’idée de construire un futur industriel plus viable ?

Opposition quasi-unanime des autochtones : raison sociale de dire non

« L’exploitation des sables bitumineux de l’Alberta est considérée comme un des pires écocides [4]  au monde. À ce chapitre, un mouvement mondial qui a vu le jour en 2010 veut faire reconnaitre le crime d’écocide au niveau du droit international comme un crime contre la paix et l’humanité [5]. Le Mouvement Endecocide présentait d’ailleurs au Président Hollande un appel en ce sens au cours de la Conférence de Paris sur les changements climatiques en décembre 2015 »
(extrait du mémoire Miron-Saint-Arnaud)
.

Le chef de l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL), Ghislain Picard, est catégorique: « Le gouvernement du Québec ne peut poursuivre son évaluation du projet Énergie Est sans une rencontre immédiate avec les Premières Nations.» Dans une lettre envoyée au ministre Heurtel en début d’année, l’organisme regroupant 43 communautés autochtones a formellement réclamé une telle rencontre.

Une Première Nation de l’Ontario se rendra en Cour suprême pour contester l’inversion de la canalisation 9B de l’oléoduc d’Enbridge, qui assure la liaison entre Sarnia et Montréal. La bataille judiciaire sur la canalisation 9B opposera la Première Nation Chippewas de la Thames à Enbridge, l’Office national de l’énergie (ONE) et la Procureure générale du Canada.

Dans une lettre adressée directement au premier ministre Philippe Couillard, le Conseil mohawk de Kanesatake a réaffirmé son opposition au projet de TransCanada, qui doit traverser le territoire revendiqué par la communauté. Le Conseil souligne que le gouvernement ne l’a jamais consulté en vue des relevés sismiques que doit mener la pétrolière afin de préciser la façon dont son pipeline traversera la rivière des Outaouais.

Le Caucus iroquois, qui regroupe des nations autochtones du Québec et de l’Ontario, s’est lui aussi opposé « à l’unanimité » au projet de pipeline. Cette contestation fait écho à celle des Premières Nations de la côte ouest qui y a bloqué la réalisation d’un important projet de pipeline qui aurait menacé leurs terres et les côtes du Pacifique.

« En résumé, les Premières Nations se considèrent à juste titre les «otages économiques du Canada » et des multinationales pétrolières, ce qui constitue également un cas d’injustice environnementale, puisque qu’il fait porter à une frange défavorisée de la population la majeure partie des risques associés au problème environnemental que soulève le projet Énergie-Est. Les Artistes pour la Paix considèrent d’ailleurs qu’en matière de consultations des autochtones, le projet TransCanada constitue une entrave importante à la paix et à la cohésion sociale au Québec »
(extrait du mémoire Miron-Saint-Arnaud).

Autre raison majeure d’abandonner ce projet : la protection de l’eau

Un principe de précaution veut protéger l’eau des 832 rivières qui seraient traversées par le pipeline Énergie-Est. Une étude réalisée par l’École Polytechnique commandée par le ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles, rendue publique à la fin décembre 2015, révèle que la construction d’un pipeline le long des berges du fleuve Saint-Laurent serait très risquée, vu leur sol trop instable pour supporter un pipeline. Or, ce pipeline menacerait directement l’approvisionnement en eau potable de plus de trois millions de Québécois. De plus, tel que souligné par le professeur en écotoxicologie, Émilien Pelletier, un déversement de bitume dilué dans le fleuve Saint-Laurent en hiver, en présence de glaces mouvantes, serait catastrophique en raison des difficultés d’intervention face à ce pétrole gluant, additionné de dilbit.

Cet argument majeur étant à juste titre répété par des centaines d’opposants au projet, nous n’insisterons pas autrement qu’en reproduisant en annexe, à la suggestion de Martine Châtelain, présidente de la coalition Eau-Secours!, un document majeur de 2008 qui n’a pas reçu l’attention qu’il méritait de la part du gouvernement conservateur de M. Harper. Et nous doutons qu’il ait été présenté à quelque branche du gouvernement québécois à l’époque de sa publication en Ontario. Voici des extraits de son préambule : « L’eau douce, élément crucial et très limité, représente le fondement de la santé de l’écosystème, de la sécurité sociale et économique du Canada. L’eau maintient la vie. Elle a un lien spirituel profond, interne et externe, avec toutes nos communautés religieuses et aborigènes. Elle définit notre identité nationale. (…) Le traitement abusif de nos ressources aquatiques met en péril la santé de nos citoyens, menace la magnifique biodiversité de notre pays et est un danger pour le bien-être de notre nation. Plusieurs communautés aborigènes vivent dans des conditions de pauvreté du tiers-monde – elles doivent toujours faire bouillir leur eau pour la rendre potable. » (voir document complet sur cette page)

Raison financière d’abandonner le projet

L’autorisation de construction d’un pipeline de milliers de kilomètres risque à coup sûr de devenir un embarras pour un gouvernement qui accorderait cette permission, dans l’expectative de restrictions nationales à venir. Car tôt ou tard la COP21 s’apercevra que la somme calculée d’émissions de gaz à effets de serres pour ne pas dépasser un seuil dangereux pour la planète a été sous-estimée à Paris : à coup sûr révisée en 2020, il serait alors trop tard pour le gouvernement face à des constructeurs rapaces qui pourraient réclamer des compensations onéreuses, si le gouvernement leur impose de nouvelles restrictions rendant leur investissement nettement moins rentable. Ce seront les payeurs de taxes, déjà surtaxés par le gouvernement fédéral, qui devront alors payer ces amendes.

Raison poétique de refuser les risques de déversement par l’oléoduc
(extrait du mémoire Miron-Saint-Arnaud)

Le territoire québécois et en particulier le fleuve Saint-Laurent ont constitué une inspiration pour plusieurs générations d’artistes québécois, de Gilles Vigneault et Pierre Perreault (Pour la suite du monde) à Jean Bédard et René Derouin [7]. Tel que signalé par les écrivains Yvon Rivard et Isabelle Miron, membres des APLP, dans une lettre au Devoir co-signée par plus de 400 personnes:

« Le fleuve qui coule entre la rive nord et la rive sud, entre l’intérieur des terres et l’océan, entre notre passé le plus ancien et notre avenir, est non seulement ce qui nous abreuve, mais aussi ce qui nous relie à nous-mêmes et nourrit notre imaginaire. Si une catastrophe se produisait, ce serait une perte irrémédiable de beauté et de mémoire. Abandonner le fleuve aux intérêts financiers à court terme, c’est compromettre la suite du monde. [8] »

Acceptabilité sociale : seulement pour les 1% ?

La présidente de l’Union des municipalités du Québec (UMQ), Suzanne Roy, a salué la demande d’injonction du gouvernement du Québec pour forcer TransCanada à se conformer à la Loi sur la qualité de l’environnement et à déposer un avis de projet pour le pipeline Énergie-Est. De passage en table éditoriale à La Tribune (Sherbrooke), Madame Roy rappelle que l’UMQ s’était rangée à la position de la Communauté métropolitaine de Montréal [9] dans le dossier du pipeline. «Nous l’avons fait non pas dans le sens du principe « pas dans ma cour », mais dans le sens de dire que comme élus municipaux, nous avons la responsabilité de nous assurer de prendre les précautions pour protéger l’eau potable et la sécurité des citoyens, et nous n’avions pas de réponse, particulièrement la Communauté métropolitaine, qui a mis un comité en place, qui a posé des questions à la compagnie et il n’y avait pas de service au numéro que nous avions composé. » Près de trois cent municipalités québécoises opposées à Énergie Est représentent des millions de citoyens.

Les Artistes pour la Paix ont accepté l’invitation du Maire de Montréal, M. Denis Coderre, de venir présenter dans le grand hall de la mairie leurs trois lauréats « artistes pour la paix » le 15 février dernier, en grande partie pour le remercier de sa prise de position courageuse contre le projet Énergie-Est. Ils sont particulièrement inquiets de la possibilité que le pétrole de l’ouest vienne nourrir une éventuelle guerre américaine impérialiste dans la lignée de celles livrées en Afghanistan, en Irak, en Syrie et même en Ukraine, où la question du gaz naturel russe a alimenté les premières guerrillas encouragées par la CIA.

Le Bloc québécois et les Verts ont lancé une pétition commune contre Énergie-Est. Les militants du NPD ont en grand nombre lors de leur congrès à Edmonton le 15 avril, malgré la présence de Rachel Notley première ministre de l’Alberta, endossé Un bond vers l’avant, version canadienne du manifeste à peu près contemporain suivant.

« Quelque 43 000 signataires ont approuvé l’Élan global pour un Québec libre des hydrocarbures, dont Yvon Deschamps, Dominic Champagne, Gilles Vigneault, Marie Tifo, Jean Lemire, Denis Villeneuve, Maude Barlow, David Suzuki, Leonard Cohen, Claude Béland, Fred Pellerin, Neil Young, Lise Payette, Donald Sutherland, Pierre Jasmin, Armand Vaillancourt, Yann Martel, Naomi Klein, Robert Lepage, Louis-Josée Houde, Micheline Lanctôt et des milliers d’autres », relate Robert Duchesne de Trois-Rivières.

« Un collectif de 170 scientifiques s’étant prononcé contre l’exploitation du gaz de schiste et près de 70 000 signataires ayant appuyé la campagne Vous n’entrerez pas chez nous contre l’implantation de puits de schiste dans la Vallée du Saint-Laurent, un collectif de 110 scientifiques nord-américains réclame un moratoire sur l’exploitation des sables bitumineux, à laquelle 21 prix Nobel dont Desmond Tutu et les scientifiques canadiens Mark Jaccard et John Stone, sont opposés.

En simple conclusion

L’avenir de notre planète et de nos enfants et petits-enfants a plus de valeur que le profit à tout prix et à court terme », conclut M. Duchesne.

Pensons aussi aux îles du Pacifique menacées de disparaître et à des pays en voie de développement qui seraient terriblement affectés tels le Bengladesh et les Philippines, sans compter les guerres qui naîtront des conséquences des fleuves taris issus de glaciers voués à l’extinction, privant les populations d’eau potable et d’agriculture, vu la sécheresse extrême amenée par les changements climatiques.

Commissaires du BAPE, en refusant Énergie-Est, vous poseriez à la suggestion des Artistes pour la Paix un geste concret pour la paix dans le monde. Vous voilà donc investis d’une immense responsabilité, qui se poursuivra après votre signature apposée sur le document où vous ferez part de votre sage, nous n’en doutons pas, décision.

 

[1] L’extinction permienne survenue il y a 252 millions d’années a été marquée par la disparition de 95 % des espèces marines et de 70 % des espèces vivant sur les continents, ce qui en fait la plus grande extinction massive ayant affecté la biosphère. En conséquence, retrouver un niveau de bio-diversification équivalent a pris beaucoup plus de temps que pour les autres extinctions massives. Cet événement a été décrit par l’auteur D. H. Erwin comme «la mère de toutes les extinctions de masse.»

[2] Le biochar (bio-charbon), invention très récente, est destiné à restaurer ou améliorer les sols: il est alors intégré, sous forme de poudre ou de petits fragments, dans des sols de pépinière, de forêt, agricoles, de jardin ou horticoles (pots de fleur), dans le but d’améliorer les propriétés pédologiques (physiques, chimiques, biologiques) du substrat. Le biochar est étudié et recommandé par un nombre croissant d’auteurs pour améliorer et stabiliser les sols tropicaux, naturellement acides et pauvres, donc fragiles, qui ont été fortement dégradés par l’agriculture et/ou la déforestation, et sont actuellement érodés ou menacés par l’érosion.

Le biochar, en tant que produit riche en carbone, stable et durable, a aussi une fonction de puits de carbone, ce qui explique qu’il suscite un intérêt croissant dans le contexte des préoccupations concernant le réchauffement climatique d’origine humaine. Il pourrait être une des solutions immédiates à l’impact globalement négatif des activités agricoles, car l’agriculture, si elle n’utilise que peu de carbone fossile sous la forme de carburants (environ 1 % de la consommation totale en France, à titre d’exemple), est fortement émettrice de gaz à effet de serre (18 % du total environ en France), et le travail du sol a dégradé le puits de carbone que constitue l’humus. Le biochar, source d’humus, permet de restaurer la capacité des sols à stocker une partie du carbone produit par la biomasse végétale. L’introduction de biochar dans un sol améliore la qualité de l’eau qui y circule (il joue le rôle de filtre), et pourrait ainsi accroître la productivité des cours d’eau et des zones humides, en améliorant la ressource halieutique et en favorisant le retour d’un bon état écologique des masses d’eau superficielles et souterraines.

[3] Les trolleybus économisent l’acier des rails des tramways, dont l’entretien est très problématique en des pays sujets à des périodes successives de gel et de dégel comme le nôtre.

[4] Écocide: acte de destruction ou d’endommagement important d’un écosystème notamment par l’exploitation excessive de celui-ci.  Cf.: https://www.endecocide.org/examples/

Pierre Jasmin et la professeure Louise Vandelac ont organisé une série de huit conférences sur le thème de l’écocide en février 2008 à l’UQAM, sous l’animation de l’écrivain Dany Laferrière.

[5] En 2010, la juriste britannique Polly Higgins proposait à la Commission du droit international des Nations Unies que le crime d’écocide devienne le cinquième crime contre la paix, au côté des crimes contre l’Humanité ou des crimes de guerre.
cf.: http://reporterre.net/Les-crimes-contre-la-nature-sont

[6] Les consultations publiques ont conduit les 82 municipalités qui forment la CMM à s’opposer au projet Énergie Est en janvier 2016.

[7] On connaît le geste sacrificiel du sculpteur qui a largué dans le fleuve des centaines de ses œuvres.

[8] http://www.ledevoir.com/environnement/actualites-sur-l-environnement/416635/port-petrolier-le-prix-du-fleuve

[9] Les consultations publiques ont conduit les 82 municipalités qui forment la CMM à s’opposer au projet Énergie Est en janvier 2016.


 

Né en Belgique en 1929, Derek Paul est formé à Bruxelles, au pays de Galles et en Angleterre à Malborough et à l’Université Cambridge (1947-50). Il décide ensuite d’émigrer au Canada où il obtient en 1958 un Doctorat en physique de l’Université Queen’s (Kingston). Membre de l’Association Canadienne des Physiciens et de l’American Physical Society depuis les années 50, il se dévoue à 42 ans d’enseignement et de recherches en physique, d’abord au Collège Militaire Royal de Kingston, puis à partir de 1964 jusqu’en 1995 à l’Université de Toronto comme professeur.

Il se joint à Pugwash en 1976 (dont il est trésorier de 2002 à 2005) et publie une recherche sur L’énergie nucléaire et la prolifération de la bombe nucléaire pour le Stockholm International Peace Research Institute en 1979. Réagissant contre l’invasion de l’Afghanistan par l’URSS, il co-fonde Science for Peace où il occupe successivement toutes les positions exécutives, effectuant quatre visites en URSS entre 1981 et 1986 et participant à un projet international appelé « Initiative Group » (1986-7).

Depuis sa retraite officielle, il a publié divers ouvrages de physique et de philosophie, sur les changements climatiques (1996 et 2014), sur l’importance de la représentation féminine en divers parlements et sur le revenu minimum garanti pour combattre la pauvreté. Il co-fonde en 2005 le Global Issues Project qui sera responsable d’onze tables rondes internationales entre 2006 et 2012, dont celle qu’il co-préside avec Adèle Buckley sur l’eau douce (8-9 novembre 2008). Il s’est joint aux Artistes pour la Paix dès son déménagement à Montréal en 2015.


 

Le pianiste Pierre Jasmin, professeur à l’UQAM de 1981 à 2014, y fonde le Centre Pierre-Péladeau et représente la Faculté des arts à la Commission des Études pendant sept ans. Diplômé de six pays différents dont l’Angleterre, l’Autriche, les États-Unis et la Russie, il mène une carrière de soliste international reconnue pour ses interprétations de Beethoven, participe à une Flottille de Paix en Croatie en 1994 (le Point y consacre une émission entière à Radio-Canada) et joue pour le Dr Tadatoshi Akiba, fondateur à Hiroshima des Maires pour la Paix, et à Rideau Hall devant le roi et la reine de Norvège pour l’ex-gouverneure générale Michaëlle Jean, actuelle Secrétaire générale de la francophonie.

Vice-président des Artistes pour la Paix, il en écrit la majorité des prises de position, dont une pétition contre les industries de guerre, appuyée par une centaine de signatures prestigieuses (voir http://www.artistespourlapaix.org/?p=7279 ). Nommé au Cercle universel des ambassadeurs de paix à Genève, ainsi que porteur d’eau pour Eau-secours! au Québec, chroniqueur régulier à l’Aut’Journal, il a co-fondé le Mouvement Sortons le Québec du Nucléaire qui réussit à faire fermer la centrale Gentilly 2.

Membre des exécutifs de Pugwash Canada (www.pugwashgroup.ca) et du Réseau canadien pour l’abolition de l’arme nucléaire (www.cnanw.ca), il prône une nécessaire alliance entre scientifiques et artistes, entre mouvements pacifiste et écologique, à l’exemple des regrettés Frédéric Back et Pierre Dansereau. Il participe à Berlin en 2011 à la 59e conférence internationale Pugwash sur la science et les affaires mondiales, où il rapproche représentants iraniens et israéliens.


 

Derek Paul (PhD in physics, Queen’s University, Kingston, ON), spent 42 years teaching and researching in physics, first at the Royal Military College, Kingston, 1953-63, then at the University of Toronto (1964-95). He became a Pugwash participant in 1976, wrote his first peace research paper, “Nuclear Reactors in Satellites” in 1978 (published in Nuclear Energy and Nuclear Weapon Proliferation, SIPRI 1979), became diplomatically active in the Cold War when the USSR invaded Afghanistan. This led to the formation of the Committee on Peace and Understanding (1980-81); to an ad hoc committee (fall 1980) that resulted in the funding of a professorship in peace studies at University College; the formation of Science for Peace (1981); four visits to the Soviet Union (1981-86), attendance at the 40th anniversary Potsdam Conference (1985), participation in the international “Initiative Group” (1986-87); further work on peace research (1987-88). Since retirement he has published on Physics and Philosophy (1996), Climate Change (1996 and 2014), the importance of balanced female representation in parliaments (1997-8), poverty elimination through guaranteed income (2012), and much else. He was Secretary of Canadian Pugwash (1978-79), Treasurer (2002-2003) and Exec member (2002-5). In SfP he was Treasurer-Vice President the first year and subsequently has held all positions of officer in SfP at various times; he was publications director for most of 1996-2000, and coordinator of working groups 1997-99. He cofounded the Global Issues Project in 2005. The Project held eight international roundtables on crucial issues from 2006-12, and a workshop on global governance.


 

logo_pugwash

Déclaration sur l’eau douce

 Science et Paix & Pugwash Canada

Table ronde d’experts sur l’eau douce, un projet sur des questions globales, 8-9 novembre 2008

 

science_for_peace

L’eau douce, élément crucial et très limité, représente le fondement de la santé de l’écosystème, de la sécurité sociale et économique du Canada. L’eau maintient la vie. Elle a un lien spirituel profond, interne et externe, avec toutes nos communautés religieuses et aborigènes. Elle définit notre identité nationale. Or, les Canadiens la considèrent comme une chose acquise.

Nous constatons des changements relativement à cette précieuse ressource renouvelable. Des manques d’eau douce surviennent plus fréquemment, les grands glaciers disparaissent graduellement et les problèmes de pollution s’aggravent. Nous sommes témoins de changements inquiétants dans le paysage de nos régions nordiques; lacs et rivières sont pollués, ou menacés.

Le traitement abusif de nos ressources aquatiques met en péril la santé de nos citoyens, menace la magnifique biodiversité de notre pays et est un danger pour le bien-être de notre nation. Plusieurs communautés aborigènes vivent dans des conditions de pauvreté du tiers-monde – elles doivent toujours faire bouillir leur eau pour la rendre potable. Dans plusieurs régions, nous échouons au test du développement durable par les abus et la surexploitation de cette ressource. Dans certaines régions du Canada, nous sommes à la croisée des chemins, au-delà de laquelle il n’y aura plus de retour.

Nous pouvons ramener à la vie nos lacs, rivières et nappes phréatiques menacés, générer des solutions innovatrices à nos problèmes d’eau, protéger la santé de nos citoyens, et mettre en place une prospérité économique et sociale – mais il faut à la base, des écosystèmes d’eau douce en santé. Pour accomplir cela, il nous faudra une gestion vigoureuse et éclairée. Les Canadiens devront travailler ensemble. À tous les niveaux des gouvernements, il nous faudra un leadership qui permettra d’instaurer des actions locales coordonnées à l’échelle régionale et nationale. De plus le Canada devra, dans son propre intérêt, œuvrer au niveau international afin d’alléger la crise mondiale de l’eau.

Principaux défis

  • La gouvernance de l’eau au Canada est sévèrement fragmentée et sans coordination entre les différents paliers des gouvernements.
  • La gouvernance de l’eau ne porte pas attention aux principes écologiques de base.
  • L’eau douce est menacée par l’érosion de nos politiques scientifiques, par la réduction draconienne des programmes de recherches/collectes de données, et par une moindre attention portée aux précautions régulatrices et à la surveillance formelle.
  • Il y a un problème de communication entre les scientifiques et les membres élus du parlement, dû principalement à leur vécu respectif; ce fossé culturel devra être comblé pour que le Canada puisse prospérer à l’ère où les décisions doivent être basées sur de la science bien fondée.
  • Il n’y a pas de rôle précis pour les citoyens dans le cadre actuel de la gouvernance de l’eau, ou d’appui suffisant pour les groupes qui se préoccupent de la conservation à l’échelle de bassin versant.
  • Le climat sur notre continent change rapidement, ce qui aura des conséquences significatives sur les cycles de l’eau ainsi que sur la gestion des ressources d’eau douce.
  • Au niveau planétaire, le Canada a sa part dans la responsabilité collective en ce qui concerne l’accès à l’eau propre et son hygiène.

Faire face aux défis

NOUS RÉCLAMONS DE TOUS LES GOUVERNEMENTS AU CANADA QU’ILS

  • transcendent les barrières juridiques qui ont fait obstacle au progrès;
  • priorisent une gestion participative à la gouvernance des ressources d’eau douce, en y engageant villes et municipalités, peuples aborigènes, divers usagers et la société civile;
  • mettent en place les alternatives connues afin de réduire l’utilisation de l’eau douce, les transformant éventuellement en pratiques courantes;
  • gèrent les risques de façon à aider à notre adaptation au changement rapide du climat, à l’augmentation de la population et à l’étalement urbain, protégeant ainsi notre bien-être économique, social et environnemental;
  • entament un dialogue plus large afin de développer une vision commune d’une STRATÉGIE PAN-CANADIENNE DE L’EAU DOUCE, basée sur certains principes-clés: une éthique de conservation, mettant à son centre les citoyens, l’eau comme fiducie publique et l’approche par bassin versant.

L’eau doit être une fiducie publique et non pas une marchandise. L’approche classique traditionnelle tend à manipuler les systèmes naturels. Les lignes de partage des eaux coïncident rarement avec les frontières politiques. Une approche de gestion par bassin versant saura reconnaître le bon fonctionnement d’un écosystème comme l’assurance que la nature continuera de fournir à la société les biens et services écologiques qui lui sont essentiels; de même, elle appréciera les interactions complexes entre le système hydrologique naturel et les activités humaines. Nous devrions satisfaire les besoins humains, agricoles et industriels par l’efficacité, la récupération/réutilisation et la conservation. Le mandat des gouvernements est de protéger et de préserver les ressources d’eau douce pour les besoins et la jouissance de tous les canadiens et canadiennes.

NOUS DEMANDONS AU GOUVERNEMENT FÉDÉRAL:

D’assumer les responsabilités qui lui sont propres en priorisant les actions suivantes:

  • Protéger la santé humaine — assurer la protection de l’eau potable dans tout le Canada.
  • Stimuler une économie bleue — lier le financement de projets pour les infrastructures d’eau potable, eaux de pluies et des eaux usées à ceux qui font place à la conservation, au rendement et à l’innovation.
  • Gérer efficacement les problèmes transfrontaliers de l’eau protéger les intérêts à long terme du Canada; reconnaître et gérer l’exportation “virtuelle” de l’eau.
  • Maintenir l’eau en place — interdire les prélèvements massifs d’eau hors des bassins du Canada.
  • Protéger les écosystèmes; renforcer les cadres règlementaires — développer des mesures efficaces pour protéger et maintenir les besoins en eau de la nature. Développer une politique fédérale sur l’eau douce intégrée à UNE STRATÉGIE PAN-CANADIENNE DE L’EAU DOUCE.
  • Respecter les populations aborigènes — honorer les droits aborigènes sur l’eau.
  • Améliorer le savoir — investir en science et en surveillance; amener l’adaptation au changement climatique au centre de nos politiques sur l’eau.
  • Ré-établir le leadership canadien dans la recherche et la surveillance internationale de l’eau — maintenir et raffermir le rôle du Canada dans les agences des Nations Unies; restaurer le statut du Canada comme l’un des centres mondiaux de la recherche sur l’eau.
  • Inciter les provinces à collaborer envers une réforme de la gestion des ressources en eau douce, fondée sur une meilleure compréhension des liens entre les enjeux économiques, sociaux et les régimes hydrologiques.
  • Diriger son aide à l’étranger de façon à amoindrir les crises d’eau douce, pour notre propre intérêt et au nom de notre responsabilité planétaire.
  • Au niveau international, promouvoir le concept de l’eau comme fiducie publique, selon laquelle la distribution équitable de l’eau est essentielle à la satisfaction des besoins personnels et domestiques de base.

NOUS APPELONS LES PREMIERS MINISTRES CANADIENS ET PARLEMENTAIRES PROVINCIAUX/TERRITORIAUX À:

  • montrer du leadership et de la coopération en bâtissant sur les efforts en cours, dans le contexte d’une stratégie pancanadienne de l’eau douce;
  • créer, avec le gouvernement fédéral, un plan spécifique de gestion par bassin versant pour chacun des bassins des cinq fleuves majeurs du Canada;
  • répondre à la crise du changement climatique par la création d’un plan pan-canadien de conservation de l’eau douce qui inclurait aussi des plans pour la préparation à des sécheresses et la protection contre les inondations;
  • faire la promotion de méthodes moins dommageables d’utilisation/usages en lien avec l’eau douce;
  • planifier pour la protection des sources d’eau douce, le calcul de la disponibilité d’eau, le suivi et les rapports, l’éducation et la communication.

PARTICIPANTS SOUTENANT LA DÉCLARATION

Oliver Brandes, Director, POLIS Project on Ecological Governance, University of Victoria

Robert Sandford, Director, Western Watersheds Climate Research Collaborative, Chair, Canadian Partnership United Nations Water for Life Decade

Gordon Young, Ph.D., Former Coordinator, United Nations World Water Assessment Programme and President-Elect, International Association of Hydrological Sciences

Maude Barlow, National Chairperson, Council of Canadians; United Nations Senior Adviser on Water

Ralph Pentland, President, Ralbet Enterprises; Acting Chairman Canadian Water Issues Council

David Brooks, Ph.D., Senior Adviser on Water, Friends of the Earth

Jennifer McKay, LLB, Ph.D., Director, Centre for Comparative Water Policies and Laws; University of South Australia, Fulbright Scholar

Marc Hudon, Director, Great Lakes and St-Lawrence program on transboundary water issues, Nature Quebec

Bert McInnis, Ph.D., Principle, What If?Technologies Inc.

DLO Mendis, formerly Technical Adviser, Ministry of Planning and Economic Affairs, Sri Lanka; President, Sri Lanka Pugwash Group

James Bruce, D.E.S., D.Sc., O.C., FRSC, Chair, Expert Panel on Groundwater, Council of Canadian Academies, and first Director of Canada Centre for Inland Waters, Burlington

Stephen Scharper, Ph.D., Associate Professor, Centre for Environment and Centre for the Study of Religion, University of Toronto

John Smol, Ph.D., FRSC, Queen’s University; Professor, Queen’s University, holder of the Canada Research Chair in Environmental Change

Randy Christensen, Ecojustice Canada, Staff Lawyer

Abrahim Khan, Ph.D., Advanced Degree Director, Faculty of Divinity; Chair, Dept. of Theology, Trinity College, University of Toronto

Hugh Whiteley, P.Eng. Professor of Water Resources Engineering, University of Guelph

Norman Brandson, former Deputy Minister of the Manitoba Departments of Environment, Conservation, and Water Stewardship

Merrell Ann Phare, Executive Director, Centre for Indigenous Environmental Resources

Sonya Meek, National President, Canadian Water Resources Association; Manager Watershed Planning Group, Toronto and Region Conservation Authority, Ecology Division

Ron Dembo, Ph.D., CEO, Zerofootprint Inc.

Aharon Zohar, Ph.D., Integrated Regional and Environment Planning, Inter-Disciplinary Centre, Herzelia, Carmei Yosef, Israel; consultant, water problems Middle East and North Africa

LE COMITÉ DE LA TABLE RONDE ET AUTRES PARTICIPANTS SOUTENANT LA DÉCLARATION:

PRÉSIDENTS

Adele Buckley, Ph.D., D.Sc., Canadian Pugwash Group, Treasurer; former V.P. Technology & Research, OCETA

Derek Paul, Ph.D., physics professor emeritus; Science for Peace, Treasurer

MEMBRES

Claus Brandes, banker (ret.)

Phyllis Creighton, M.A. (His), Faculty of Divinity, Trinity College; Board of Directors, Science for Peace

David Harries, Ph.D., Foresight Canada; Royal Military College, Kingston; Board of Directors, Canadian Pugwash

Julia Morton-Marr, DStG, B.Ed., Dip. T., founder of International Holistic Tourism Education Centre (IHTEC); Board of Directors, Science for Peace

AUTRES PARTICIPANTS:

Linda Mortsch, Ph.D., Adaptation and Impacts Research Division, Environment Canada; Co-author, Part Two, 4th IPCC Report

Tony Maas, Senior Policy Adviser for Water, World Wildlife Fund Canada

Smita Kothari, Ph.D. candidate, Department and Centre for the Study of Religion, University of Toronto


 

Ce document ne représente pas un endossement de la position des Artistes pour la Paix par Pugwash ou Science for Peace : il a été rappelé à notre attention par le professeur émérite de l’Université de Toronto, le physicien Derek Paul, qui siège depuis 2015 au conseil d’administration des Artistes pour la Paix