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Photo : National Post

Mardi le 18 juin 2019, annonce a été faite par le Premier ministre Trudeau, malgré les coûts projetés (ce ne sont plus $6.9 milliards, mais plus de 9 milliards), d’élargir l’oléoduc Transmountain pour assurer un débouché du pétrole sale des sables bitumineux vers la Chine; et ce au mépris de la sécurité maritime et écologique du détroit de Vancouver, comme a aussitôt réagi le Premier ministre de la Colombie Britannique qui n’hésitera pas à aller en Cour suprême. Lisez ce que nous écrivions il y a un an [1] :

Bruce Livesey du Guardian a repris l’estimation du Financial Post de coûts projetés de $6.9 milliards additionnels aux 4.5 milliards à verser à Kinder Morgan: “Le désir féroce de Trudeau de construire le pipeline à n’importe quel coût” [s’oppose] bizarrement au fait que l’oléoduc acheminera du pétrole non raffiné ou bitumen aux États-Unis et en Chine, ce qui coûtera à l’économie canadienne l’avantage d’emplois de raffineries (où la majorité des emplois pétroliers se trouvent) et accroîtra le phénomène des fermetures de raffineries canadiennes. Sans compter que le développement des sables bitumineux forcera le Canada à rater, par une marge catastrophique génératrice de réchauffement global, ses engagements à la COP21 de 2015 de réduire ses émissions à gaz à effet de serre de 30% pour 2030. La logique trudeauesque procèderait du Canada-China Foreign Investment Promotion and Protection Agreement (Fipa), négocié par le gouvernement Harper sans être passé par un vote du Parlement et qui restera en vigueur jusqu’en 2045 : l’entente assurait à la Chine qu’un pipeline serait construit à partir de l’Alberta jusqu’en Colombie-Britannique, en “récompense” de ses lourds investissements dans les sables bitumineux. Car la Chine a acheté en 2009 60% de 2 projets et surtout en 2013, à travers le CNOOC (contrôlé par l’état chinois), la 3e compagnie pétrolière du Canada, NEXEN, au coût de 15.1 milliards de $ !

Qui est vraiment réaliste ?

L’annonce de mardi réaffirme combien les politiciens traditionnels font primer l’économie pétrolière et nucléaire sur la vie humaine, ce qui est d’autant plus cynique que le gouvernement libéral venait d’endosser la Déclaration d’Urgence Climatique, rédigée après les conclusions scientifiques irréfutables de la GIEC [2] (ONU) renchéries par   l’Agence canadienne d’évaluation environnementale. Désormais, le Canada libéral privilégiera l’OTAN qui a soif de pétrole pour ses armées et sa ministre Chrystia Freeland renouvellera ses attaques contre une Ukraine pourtant redevenue non sectaire et contre le gouvernement légitime Maduro au Venezuela.

Quant aux Conservateurs, leur « plan vert » faisant confiance aveugle aux « technologies vertes » supposément capables d’atteindre les cibles anti-GES du Canada en 2030 procède d’une illusion totalement irréaliste. Voilà donc renversés les rôles entre les deux grands partis traditionnels du « pouvoir réaliste » au Canada (en imitation servile de son voisin du sud) et les écologistes-pacifistes, vraiment pragmatiques, mais qui devraient émietter leurs votes entre Bloc Québécois, NPD, Parti Vert et les deux indépendantes Raybould-Wilson et Philpott, selon la région où ils se trouvent.


[1]  http://www.artistespourlapaix.org/?p=14921

On y répétait cette position raisonnable (hélas non reprise par les leaders écologistes ?) adressée en une lettre : « Que vous coûterait, M. Trudeau, de respecter la demande très raisonnable du gouvernement de Colombie-Britannique qui n’exige même pas l’arrêt de l’acheminement des 300 000 barils par jour que Kinder Morgan continuera à acheminer, même si la réponse à son ultimatum du 31 mai était : Non merci, ne faites pas de dépense supplémentaire pour accroître le débit de votre pipeline, car cela viendrait en contravention

  • avec l’intérêt local de toutes les terres traversées par votre pipeline et des 16 000 hectares  (sic) d’eau, gérées (re-sic!) par le port de Vancouver
  • avec l’intérêt des plus jeunes générations. Laissez-les profiter plutôt de la production de pétrole étalée sur davantage d’années, à moins, bien entendu, qu’elles soient amenées à réclamer son arrêt par considération pour l’intérêt planétaire, l’exploitation des sables bitumineux étant le plus grand facteur localisé d’accroissement de la pollution extrême et du réchauffement climatique mondiaux. »

 

Trudeau vient de renier à 180 degrés ses promesses électorales et celles qu’il avait vigoureusement affirmées à la face même de l’univers à Paris en décembre 2015 (COP21) : le résultat en cynisme accru de la population envers la politique et son processus électoral démocratique peut être terrible. Déjà, la montée du radicalisme destructeur de groupes où l’extrême-gauche (Black Block) rejoint l’extrême-droite (Atalante, la Meute, les Soldats d’Odin, la Fédération des Québécois de souche, Horizon Québec Actuel, etc.) est difficile à contrer efficacement, alors qu’en sera-t-il maintenant, alors que notre démocratie vient d’assister à la capitulation de Trudeau, complice de l’OTAN et du NORAD, devant la puissance d’argent des pétrolières associées au militarisme des États-Unis ?

[2] Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat.