À force de sondages, Radio-Canada va bien finir par poser les deux questions fondamentales évitées jusqu’à présent par tous nos médias :

1- l’accroissement exponentiel du phénomène de l’immigration, cause de la montée du populisme raciste et de l’islamophobie, a-t-il OUI ou NON pour origines les guerres des États-Unis alliées avec l’Arabie saoudite salafiste djihadiste en Afghanistan, en Irak, au Moyen-Orient et en Afrique du Nord?

2- l’armée canadienne et nos industries d’armement aux immenses budgets peuvent-ils imposer par la force un modèle de « valeurs canadiennes » au reste du monde ?

La réponse des Artistes pour la Paix est sans nuances OUI à la première et NON à la seconde. AUCUNE VALEUR NE S’IMPOSE PAR LA FORCE et le texte d’André Jacob (voir l’article précédent), montre bien l’hypocrisie du Premier ministre Justin Trudeau qui se cherche du capital politique, alors que honteusement, il ne remet pas en question les bombardements aux conséquences catastrophiques du général Charles Bouchard commandés par l’OTAN en Libye (2011) et qu’il renie la position traditionnelle du Canada face aux bombes nucléaires. Heureusement sa politique d’accueil des réfugiés syriens reste libérale et efficace, grâce à l’appui des gouvernements libéral provincial et municipal au Québec.

Si le Canada et le Québec ont des « valeurs » respectées dans le monde, c’est parce que plus jeunes que les puissances européennes et moins gros que les USA, ils ont eu la chance de tarder à endosser l‘attitude colonialiste et de renier au contraire assez vite celle évangélisatrice. Quelques exemples :

– Prix Nobel de la Paix, Lester B. Pearson a la vision des Casques bleus de l’ONU en 1957, année de fondation des Conférences mondiales Pugwash pour la science et les affaires mondiales (prix Nobel de la Paix 1995, Pugwash tient son nom d’un village situé en Nouvelle-Écosse).

– John Diefenbaker s’oppose ouvertement en 1963 à l’acquisition par le Canada d’armes nucléaires, dont Pierre Elliott Trudeau réduit le nombre mondial en rapprochant Américains et Russes à l’occasion de SALTII.

– Brian Mulroney réussira à vaincre l’apartheid et les réticences des Thatcher et Reagan en obtenant la libération de Nelson Mandela en 1990 après 28 ans d’emprisonnement.

– Jean Chrétien instaure le traité d’Ottawa contre les mines anti-personnel (Prix Nobel de la Paix 1997) et favorise l’émergence de la Cour Pénale Internationale de La Haye (1998) dont le premier juge et fondateur est le Canadien Philippe Kirsch.

– le prix Nobel de la paix 2013 est décerné à l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques (OIAC ou OPCW en anglais), en particulier au courageux militaire canadien Scott Cairns chargé de superviser le démantèlement de l’arsenal chimique syrien de Bachar al-Assad.

– Mentionnons enfin que l’Institut International de Recherche sur la Paix de Stockholm (SIPRI) voit deux Canadiens, Tarik Rauf et Aude-Emmanuelle Fleurant diriger l’un le programme de désarmement nucléaire, de contrôle des armes et de non-prolifération, l’autre celui des armes et dépenses militaires mondiales.

Pas mal comme valeurs de paix canadiennes et québécoises…

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Le gouvernement du Québec dénonce tardivement ses pensionnats catholiques imposés aux autochtones, incubateurs à pédophilie. Heureusement, ses missionnaires présents au Tiers-Monde se convertissent eux-mêmes en reconnaissant avec Développement et Paix les ravages colonialistes de nos industries minières, pour qu’émergent Alternatives, Amnistie internationale et OXFAM à l’écoute des populations opprimées.

La Charte des valeurs péquistes de 2013 aurait gagné à se contenter d’affirmer l’égalité de la femme et à accepter l’offre de la CAQ pré-électorale de voter la mise en vigueur des recommandations du rapport Bouchard-Taylor, sans chercher à contraindre par la force des immigrants à abandonner leurs traditions. Triste que le gouvernement Couillard fasse route solitaire en sens inverse et nourrisse à court ou moyen terme la controverse dont souffriront les immigrants qu’il prétend aider.

Les Artistes pour la Paix sont fiers d’avoir apporté leur contribution aux visions de paix grâce, entre autres, à des cinéastes portant prophétiquement les voix autochtones, tels Arthur Lamothe et Alanis Obomsawim à qui nous avons rendu hommage en 2014 et 2015, et grâce à Simonne Monet-Chartrand (APLP1991) qui quoique mère de famille nombreuse catholique (on l’accusera alors de délaisser ses enfants) et épouse d’un militant syndicaliste qui a fait de la prison au nom de ses idéaux, n’en a pas moins affirmé son féminisme-pacifisme en militant jusqu’en Union Soviétique avec Voix des femmes.

Et ces choix de valeurs de paix ont reçu l’adhésion populaire par les immenses marches de paix (à Montréal, en 2003 contre l’entrée en guerre en Irak et en 2012 pour le Jour de la Terre avec Dominic Champagne et Frédéric Back) et même par la préférence des destinations-soleil de Cuba égalitaire, du Costa-Rica sans armée et d’Haïti, dont l’industrie touristique est en émergence. On comprend qu’on ouvre ainsi la porte à mille exemples culturels de nos « valeurs de paix » fort éloignées des cocoricos nationaleux de nos leaders dits libéraux.

Pierre Jasmin
v-p Artistes pour la Paix et membre de l’exécutif de Pugwash Canada