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Un documentaire How the Pentagon Dictates Hollywood Storylines révèle comment opère un département spécial de la Défense américaine pour « vendre » le militarisme global et agressif des USA, en imposant son influence sur des milliers d’émissions télévisées et de films distribués à travers le monde.

La plupart des informations de cet article provient de Jonathan Cook qui a gagné le Prix Spécial Martha Gellhorn en Journalisme. Les derniers bouquins de cet auteur basé à Nazareth sont Israel and the Clash of Civilizations: Iraq, Iran and the Plan to Remake the Middle East (Pluto Press) et Disappearing Palestine: Israel’s Experiments in Human Despair (Zed Books). On peut accéder à son site web sur www.jonathan-cook.net ou le lire sur www.AntiWar.com

Le documentaire des Anglais Tom Secker et Matthew Alford mentionné en début d’article, sous-titré Theaters of War, révèle l’influence exercée par le Pentagone pour propager sa propagande à travers des milliers de films de Hollywood et empêcher d’innombrables autres de voir le jour, quand ils s’obstinent à montrer le vrai visage incompétent et meurtrier d’actions militaires américaines, par exemple au Venezuela, en Ukraine, en Somalie, en Afghanistan, en Syrie, en Iraq, au Yémen…

Le département n’influence pas seulement la façon de montrer les guerres par Hollywood, il exige d’inspecter les scénarios et y dicte des changements draconiens à ceux qui auraient montré la réalité agressive et destructrice des guerres, afin d’influencer les spectateurs à accepter l’inacceptable, quitte à effacer toute trace « d’incompétence militaire, de perte de contrôle sur les bombes nucléaires, toute influence des compagnies pétrolières, toutes ventes d’armes illégales ou échanges de drogues, tout usage d’armes chimiques ou biologiques, toute promotion américaine de coups d’états ou d’implication dans des tortures ou assassinats, toutes choses que les militaires américains ont commises. »

Mais le Pentagone ne veut pas qu’on reconnaisse leurs contributions à ces films, par exemple leur livraison de porte-avions, d’hélicoptères, d’avions de combat, de pilotes et de sous-marins, car combien de spectateurs prendraient au sérieux des films précédés d’un logo de la CIA ? Et pourtant ont joui de son appui des films comme Apollo 13, le Parc Jurassique, les James Bond, Marvel, Transformers, Godzilla [1] qui deviennent plus ou moins des publicités favorables aux industries militaires fournissant les guerres. Le Pentagone a été particulièrement vigilant après le fiasco de Mogadiscio en bloquant un film ridiculisant l’incompétence militaire illustrée par une douzaine de morts de soldats américains et des centaines de Somaliens. Au Canada, au contraire, Jean Chrétien avait courageusement abrogé le régiment aéroporté coupable de tortures envers un jeune Somalien ayant tenté de s’introduire illégalement dans un entrepôt de provisions canadien.

Falsifications de l’histoire de l’Iran et de l’Iraq

La déconfiture en Iran de l’armée américaine, qui a pavé la voie à l’élection de Reagan contre Carter avec les échanges d’armes du colonel North, a provoqué le film Argo en 2012 dont « le scénario fabriqué et remanié par la CIA montrait une rare victoire américaine contre de sauvages ennemis sans visages ». Tant pis si le scénario taisait les manigances de la CIA pour déposer le démocrate Mossadeh en 1953 et imposer le Shah brutal, diminuait le rôle courageux des Canadiens ayant permis la libération des six otages américains et ignorait le sort des 52 autres restés au cachot une année de plus !

Avec les mauvais films de Bigelow Les démineurs et Zero dark thirty qu’Hollywood préféra couronner plutôt que l’antimilitariste Avatar de son mari canadien James Cameron, on affirma que le « waterboarding », forme de torture par suffocation, avait permis la révélation de secrets militaires ayant permis la capture et l’exécution d’Osama Ben Laden, ce qui n’est pas prouvé, au contraire, selon le héros de guerre capturé au Vietnam du Nord, le candidat de droite à la présidence John McCain, qui critiqua sévèrement le film.

Tom Cruise “laughing all the way to the bank”, TVA

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Deux images icôniques de Tom Cruise à trente-six ans d’écart, le plus vieux hilare.

« Laughing all the way to the bank » n’est pas l’expression utilisée par TVA qui annonçait le 5 septembre que TOP GUN MAVERICK reprenait cette fin de semaine la première place en popularité des films présents sur nos écrans québécois, place qu’il avait longtemps tenue au début l’été après son lancement fin mai. C’est plutôt une expression consacrée révélant combien la popularité malfaisante d’un créateur peut le « conduire mort de rire vers sa banque », étant entendu dans le cas de la vedette adhérant aux codes de la secte de Scientologie que son argent servirait plutôt à séduire et à attirer des familles exploitables par leur crédulité (au prix de combien de séparations et de suicides ?).

Un article de Pierre Jasmin intitulé La gloire de TOP GUN et le massacre des enfants d’Uvalde publié non seulement sur notre site, mais aussi par l’Aut’Journal, Entrée libre (Sherbrooke) et par Pressenza.com, montrait que son titre et la glorification de l’utilisation d’armes létales risquait de mener des jeunes à la santé mentale fragile à vouloir devenir héros à l’aide d’armes à feu.

Et Top Gun ressuscitait un message des années 1980 pour vendre la guerre et la rendre sexy, le tout lors d’une année où les statistiques d’agressions sexuelles à l’intérieur de l’armée ont explosé. Le Pentagone a rentabilisé son investissement, tout en imposant des conditions telles que la révision du script, l’insertion de commentaires verbeux clés et la censure de scènes qui lui déplaisaient (jamais la violence!). Theaters of war révèle d’ailleurs que dans Iron Man, son personnage principal joué par Robert Downey Jr. devait originellement s’opposer à l’industrie militaire grâce à l’invention par son père d’une technologie capable d’arrêter les guerres. La réécriture du Pentagone a renversé cette tendance et le personnage Tony Stark affirme que « la paix signifie porter un bâton plus gros que celui de l’adversaire », ce qui devient carrément grossier lorsque le héros exposé à une critique d’une journaliste contre son empire d’affaires, l’entraîne au lit pour ainsi affirmer qu’elle n’était qu’une hypocrite, comme tous les opposants à la guerre, en particulier celle en Ukraine où les États-Unis continuent à déverser leurs milliards de $ en produits de leurs usines militaires, même au risque d’une guerre nucléaire…

Heureusement, il y a eu des exceptions culturelles !

Il faut hélas remonter à 1983 pour un cas d’insubordination éloquent avec The day after, un film pendant la Guerre froide fait en dépit des objections du Pentagone par Nicholas Meyer et Edward Hume pour la TV américaine, décrivant réalistement à partir de Kansas City des échanges nucléaires entre Moscou et Washington. Le Département de Défense avait demandé que la Russie soit carrément blâmée pour avoir commencé la guerre fictive. Les cinéastes tinrent leur bout, présentant les Russes comme des êtres humains aux prises avec la même menace existentielle que les Américains ordinaires. Près de la moitié de la population américaine regarda le film et Ronald Reagan fut assez déprimé au point d’aller de l’avant pour une réduction des bombes nucléaires, alors que l’année d’avant il avait censuré le film de l’ONF gagnant d’un Oscar Si vous aimez cette planète de madame Terre Nash. On peut donc se poser la question pourquoi le monde semble aller si mal en s’enfonçant vers la guerre aujourd’hui ?


[1] L’invraisemblable recréation du film pilotée par le Pentagone non seulement enlève toute référence à Hiroshima présente dans l’original, ne lui substitue évidemment pas Fukushima, mais va jusqu’à proposer qu’un sous-marin atomique russe aurait déclenché la furie de Godzilla 2014 et dans la version 2019, montre la salvation de l’humanité par une bombe nucléaire qui seule peut détruire Godzilla !! Amen !