L’Amérique pleure des Cowboys Fringants (nous résumons ici un article écrit il y a deux ans et demi par Pierre Jasmin dans l’Aut’Journal[i]) défend avec opiniâtreté le monde ouvrier des humbles de la terre, dans des décors de pauvreté assumée, avec comme splendides rédemptions, la promesse d’une éducation écologique salvatrice (Jérôme Dupras, professeur chercheur à l’UQO), la résilience humaine (Karl Tremblay luttant contre un cancer) et l’art engagé (avec la générosité de la Fondation Cowboys fringants). Peut-on parler de poésie dans un film qui, comme l’Oscarisé de l’année Nomadland de Chloé Zhao, nous entraîne dans des décors d’une Amérique dans sa laideur extrême de mines abandonnées, de rocailles désertiques, d’autoroutes disjonctées, de stationnements de Walmarts et d’entrepôts Amazon mais dont les images parlent de dépouillement misérable qu’on transpose au mieux en simplicité (in)volontaire ramenant tous les rapports humains à un dénominateur commun proche de la philosophie du renoncement du poète depuis disparu Christian Bobin, que nous avait fait découvrir Richard Séguin?

Le thème du voyage habite naturellement les saltimbanques Cowboys Fringants nous entraînant dans leur dernière tournée en plusieurs environnements urbains en décrépitude. La pénétrante poésie urbaine et politique de Jean-François Pauzé chantée par Karl Tremblay nous offre leur si beau chant Les étoiles filantes animé par la gracieuse Marie-Annick Lépine, qui joue d’une demi-douzaine d’instruments avec un entrain animé de sourires, les trop rares du film : encore un modèle de féminisme salvateur!

Écrites le 14 décembre 2015, les paroles de leur immortelle et visionnaire chanson :
LE DERNIER HUMAIN DE LA TERRE
Il ne reste que quelques minutes à ma vie
Tout au plus quelques heures, je sens que je faiblis
Mon frère est mort hier au milieu du désert
Je suis maintenant le dernier humain de la terre. (…)

Tout ça a commencé il y a plusieurs années
Alors que mes ancêtres étaient obnubilés
Par des bouts de papier que l’on appelait argent
Qui rendait certains hommes vraiment riches et puissants (…)
Et ces nouveaux dieux ne reculant devant rien
Étaient prêts à tout pour arriver à leurs fins
Pour s’enrichir encore ils ont rasé la terre
Pollué l’air ambiant et tari les rivières (…)
C’est des années plus tard qu’ils ont vu le non–sens
Dans la panique ont déclaré l’état d’urgence
Quand tous les océans ont englouti les îles
Et que les inondations ont frappé les grandes villes
Et par la suite pendant toute une décennie
Ce furent les ouragans et puis les incendies
Les tremblements de terre et la grande sécheresse
Partout sur les visages on lisait la détresse
Les gens ont dû se battre contre les pandémies
Décimés par millions par d’atroces maladies
Puis les autres sont morts par la soif ou la faim
Comme tombent les mouches…
Jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien…
Plus rien…
Plus rien…
Mon frère est mort hier au milieu du désert
Je suis maintenant le dernier humain de la terre
Au fond l’intelligence qu’on nous avait donnée
N’aura été qu’un beau cadeau empoisonné
Car il ne reste que quelques minutes à la vie
Tout au plus quelques heures, je sens que je faiblis
Je ne peux plus marcher, j’ai peine à respirer
Adieu l’humanité… Adieu l’humanité…

L’article fut salué par un commentaire de Pascale Camirand le 17 avril 2021 :

Magnifiques textes que le tien et celui de la chanson (que je ne connaissais pas). Espérons que l’agonie du dernier humain n’aura pas lieu de cette façon. Mais on peut douter de la volonté des milliardaires d’en finir avec le capitalisme sauvage.

Ne doutons pas, chère Pascale, travaillons avec l’ONU pour le désarmement.

[i] 16 avril 2021 – https://www.lautjournal.info/20210416/vinland-nomad-et-fringants