Merci d’avoir donné suite à l’appel à tous les acteurs du milieu culturel afin de dire haut et fort et d’une seule voix que la rhétorique de la peur dont use le gouvernement pour justifier l’usage de la force est dangereux, indigne d’une société démocratique et extrêmement violent. Face aux propos de la ministre de la Culture, qui estimait que le carré rouge est le symbole de la violence et de l’intimidation, nous avons combattu le mépris affiché et persistant de nos représentants politiques vis-à-vis notre intelligence.
Des milliers de signatures ont été acheminées (voir ledevoir.com).
Madame Christine St-Pierre,
Ministère de la Culture, des Communications et de la Condition féminine
225, Grande Allée Est Québec (Québec)
G1R 5G5
Madame la ministre,
C’est avec grand désarroi que nous avons pris connaissance des propos que vous avez prononcés ce vendredi 8 juin, propos selon lesquels « nous, on sait ce que ça veut dire le carré rouge, ça veut dire l’intimidation, la violence, ça veut dire aussi le fait qu’on empêche des gens d’aller étudier »1. Nous nous trouvons aujourd’hui dans l’obligation de vous demander de présenter des excuses publiques pour ces propos démagogiques qui tentent de discréditer la légitimité du port du carré rouge et de réduire malhonnêtement le sens qui lui est attaché, méprisant du coup le choix réfléchi et affirmé de très nombreux membres de la communauté artistique québécoise.
Que la ligne de parti vous oblige à une certaine réserve, nous le comprenons, mais que vous prêtiez si facilement votre ministère comme tribune à ce type de propagande alors qu’il est chargé d’administrer et de représenter les intérêts du milieu culturel québécois, nous indigne profondément: vous n’êtes pas sans savoir que la grande majorité des acteurs de ce milieu arborent fièrement le carré rouge. Tout comme le Premier ministre se doit d’être le représentant des intérêts de tout un peuple (chose qui, malheureusement, est actuellement mise en doute au Québec), une ministre de la Culture ne peut se permettre de mépriser les artistes et les travailleu(rs)ses culturel(le)s qui fondent les raisons d’être de son ministère.
Si votre objectif, en stigmatisant la violence associée au mouvement étudiant, est de vous faire du capital politique, nous tenons à vous rappeler que ce genre de stratagème éveille ce qu’il y a de plus boueux dans les consciences, et que de ne pas le savoir est indigne d’une ministre de la Culture. Or ce ne sont pas les voix qui manquent pour relever le sens et le niveau du débat que de toute évidence vous travaillez à abaisser: ces voix constituent le terrain fertile de la culture et viennent précisément de ce pan de la société qui oppose une culture humaniste à cette culture d’entreprise qui violente la libre pensée. Si le seul argument que vous décidez d’opposer à ce schisme idéologique profond est le recours à la peur pour justifier la nécessité du maintien de l’ordre, nous tenons à vous rappeler que ce flirt est extrêmement dangereux, et que dresser les vieux épouvantails de la peur au service de l’ordre rappelle de très mauvais souvenirs d’une histoire pas si lointaine.
Il est plus que temps que vous et les membres de votre parti preniez les responsabilités qui vous incombent en tant que représentants politiques quand vous usez de tels moyens de propagande pour diviser l’opinion publique, en stigmatisant le port du carré rouge comme un geste soutenant la violence. Vous aimez « oublier » que ce mot qui vous vient si fréquemment aux lèvres n’est pas incarné par les centaines de milliers de personnes, étudiants et citoyens qui marchent chaque soir dans nos rues, mais par un corps policier qui multiplie honteusement les gestes de brutalité envers des manifestants pacifiques.
Vous aimez « oublier », aussi, que cette violence est celle de vos mots menteurs et méprisants, de votre inaction et de votre irrespect envers une part grandissante de notre population. Ce glissement sémantique témoigne de votre condescendance vis-à-vis de notre intelligence et du peu de respect que vous avez pour les raisons profondes et réfléchies d’arborer ce bout de tissu rouge. Une ministre de la Culture doit savoir faire preuve de discernement et ne pas rater l’occasion d’élever le débat au-dessus de la mêlée. Ce ne fut malheureusement pas le cas ce vendredi 8 juin et nous exigeons des excuses pour ce faux pas qui tente de nous plonger dans une rhétorique de la peur et dénigre par le fait même l’intelligence du milieu culturel et de ses représentants, qu’ils portent ou non le carré rouge. Nous ne pouvons consentir à cet abaissement du débat sur la place publique et cautionner par notre silence vos propos irrespectueux.
En espérant que vos mensonges cesseront rapidement de leurrer notre population, nous signons tous, acteurs et actrices du milieu culturel québécois.
Nous sommes parmi les signataires:
Daniel-Jean Primeau et Pierre Jasmin, au nom des trois cents membres en règle des Artistes pour la Paix (voir <http://artistespourlapaix.org/>www.artistespourlapaix.org )
1 La Presse et Le Devoir, samedi 9 juin 2012. Références électroniques: <http://www.lapresse.ca/le-nouvelliste/artsspectacles/>http://www.lapresse.ca/le-nouvelliste/artsspectacles/
201206/08/01-4533110-fred-pellerin-et-lordre-national-du-quebec-au-dela-des-honneurs-il-y-a-des-convictions.php et
<http://www.ledevoir.com/culture/actualites-culturelles/352046/le-carre-rouge-de-fred-pellerin-violence-et-intimidation-affirme-laministre->http://www.ledevoir.com/culture/actualites-culturelles/352046/le-carre-rouge-de-fred-pellerin-violence-et-intimidation-affirme-laministre-de-la-culture
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Lucie Bélanger
Adjointe à l’édition
Éditions Triptyque / revue Mœbius
514 597-1666
<mailto:lbelanger@editiontriptyque.com>lbelanger@editiontriptyque.com
LE DEVOIR Québec — Confrontée à la colère du milieu culturel, la ministre Christine St-Pierre a présenté mercredi ses excuses auprès des artistes outrés par ses propos associant le carré rouge à la violence. Une fronde sans précédent des artistes et autres acteurs du milieu a eu raison de la détermination de la ministre de la Culture qui avait refusé net, la veille, de faire acte de contrition malgré les appels répétés de l’opposition péquiste.
«Si des gens ont été blessés par mes commentaires, je m’en excuse», a dit Mme St-Pierre lors d’un court point de presse avant la période des questions à l’Assemblée nationale.
PIERRE JASMIN vp Artistes pour la Paix, ajoute ceci:
Dans son entrevue le 13 juin à 17h 30 à Michel Désautels (SRC), la ministre a demandé que tous sans exception condamnent toute violence, prenant garde toutefois d’énoncer quelque exemple que ce soit de brutalité policière. Les Artistes pour la Paix n’ont pas attendu son conseil pour condamner toute violence, qu’elle origine de casseurs, d’étudiantEs vandales ou de policiers excédés.
Et si jamais on va jusqu’à condamner la violence verbale, on devra hélas retenir en exemple la sortie de la ministre vendredi dernier et les dérapages aujourd’hui-même à l’Assemblée Nationale du ministre Fournier et du premier ministre, sans compter les radios-poubelles et les commentaires populistes…
Pourrait-on calmer un peu les discours???
Accuser Amir Khadir de violence parce que sa fille a acheté il y a plus d’un an une affiche-pastiche de Delacroix d’un groupe québécois, c’est malhonnête, surtout quand c’est amplifié par des médias de masse en page couverture, accompagnée de commentaires violents…!