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Madame Meng Wanzhou bien entourée au sortir de la cour de justice- Photo VCG.com

Brefs rappels sur certains côtés politiques de l’affaire Meng Wanzhou

Tous s’accordent à considérer l’affaire Meng Wanzhou comme une « patate chaude ». Mais le Président Joe Biden et le Premier ministre Trudeau évitent maladroitement le vrai sujet pour s’entendre à condamner la détention arbitraire des Michael Kovrig et Michael Spavor, tandis que la plupart des diplomates internationaux croient que régler d’abord celle tout aussi arbitraire de la numéro 2 de Hua Wei serait le début d’une solution équitable.

Même au Canada, l’unanimité ne se fait vraiment pas pour appuyer les Freeland-Trudeau. L’ex-patron du CISC, l’agence canadienne d’espionnage [1], M. Richard Fadden, a qualifié le travail canadien en politique étrangère face à la Chine d’« échec abominable », après avoir « écouté pendant des années des ministres et des premiers ministres essayer d’aboutir à une politique étrangère [de consensus]. » [2] (Vive la liberté journalistique permettant aux fonctionnaires d’exprimer leurs opinions… après leur retraite).

Même la respectée ex-diplomate onusienne Louise Arbour, il y a plus d’un an, a fait une sortie convaincante pour demander au ministre de la Justice David Lametti de libérer la femme d’affaires chinoise, hélas sans résultat. Ce dernier a invoqué « la judiciarisation » afin de couvrir son indécision peureuse à remédier à la gaffe de Chrystia Freeland qui avait, il y aura bientôt trois ans pendant lesquels la femme d’affaires n’a revu ni sa famille (avec une exception) ni son pays, emprisonné Meng Wanzhou pour plaire au président Trump.

Déclaration de la campagne pancanadienne pour la libération de Meng Wanzhou

Convoquée le 2 août par la Hamilton Coalition to Stop the War, une réunion virtuelle a illustré une intervention de l’avocat John Philpot qui a bien expliqué la présente situation judiciaire de cette semaine où Meng Wanzhou comparaît devant une audience d’extradition, et ensuite approuvé la déclaration suivante pour circulation au pays :

Le juge Holmes s’est récemment rangé du côté de la Couronne et contre l’équipe juridique de Mme Meng en excluant 300 documents bancaires de la HSBC comme preuves lors de la dernière série d’audiences d’extradition qui débutait mardi le 3 août 2021. Ces documents prouvent que Mme Meng a fourni à HSBC des informations complètes sur les transactions liées à l’Iran et qu’aucune fraude n’a été commise. Huawei a obtenu ces documents grâce à une procédure judiciaire réussie à Hong Kong, en Chine. Le juge Holmes a décidé que les documents seraient traités de manière plus appropriée à une date ultérieure dans un tribunal américain où Mme Meng pourrait être envoyée, en fonction de l’issue du procès, pour faire face à plusieurs inculpations pour fraude qui pourraient entraîner une peine cumulée de plus de 100 ans de prison.

Naturellement, nous ne sommes PAS d’accord avec la décision du juge Holmes. La Campagne pancanadienne pour la libération de Meng Wanzhou est d’avis que, compte tenu des preuves contenues dans les 300 documents, le ministre de la Justice David Lametti devrait utiliser son pouvoir discrétionnaire, tel que prévu par l’article 23 de la Loi sur l’extradition, pour mettre fin aujourd’hui à l’extradition de Mme Meng et la libérer immédiatement pour qu’elle retourne en Chine. Après tout, le ministre et le cabinet sont parfaitement au courant du contenu des nouveaux documents HSBC : l’essentiel de ces nouvelles preuves a été largement couvert par les grands médias du monde entier.

Comme toujours, nous maintenons que le gouvernement Trudeau n’aurait jamais dû collaborer avec l’administration Trump pour arrêter Mme Meng il y a près de trois ans. Le fait même que Trump ait explicitement fait remarquer, plusieurs jours plus tard, qu’il avait l’intention de retenir Mme Meng en otage et de l’utiliser comme monnaie d’échange dans sa guerre commerciale avec la Chine, a montré que la demande d’extradition était de nature politique et aurait donc dû invalider la demande américaine en vertu de la Loi sur l’extradition du Canada. En outre, la demande américaine d’extradition de Mme Meng était fondée sur la fausse prémisse de l’extraterritorialité américaine, c’est-à-dire qu’elle tentait d’exercer une juridiction américaine inexistante sur des transactions entre Huawei, une entreprise chinoise de haute technologie, HSBC, une banque britannique, et l’Iran, un État souverain, dont aucune des transactions (dans cette affaire) n’a eu lieu aux États-Unis. En demandant l’extradition de Mme Meng du Canada vers les États-Unis, Trump envoyait également un signal aux dirigeants politiques et commerciaux mondiaux que les États-Unis continueraient à appliquer leurs sanctions économiques unilatérales et illégales sur l’Iran qui étaient censées avoir été levées en vertu de la résolution 2231 du Conseil de sécurité de l’ONU lorsque le JCPoA (Plan d’action global conjoint avec l’Iran) est entré en vigueur le 16 janvier 2016. Enfin, Trudeau n’aurait pas dû collaborer avec Trump en raison de l’intention malveillante de ce dernier de paralyser Huawei afin de garder la Chine dans sa vision d’un pays sous-développé.

En libérant Mme Meng aujourd’hui, le Canada pourrait faire preuve d’une certaine indépendance en matière de politique étrangère et commencer à rétablir des relations politiques et économiques amicales avec la République populaire de Chine, notre deuxième partenaire commercial en importance, pour le bénéfice mutuel des peuples canadien et chinois.

Le prochain événement public de la Campagne pancanadienne pour libérer MENG WANZHOU aura lieu en septembre 2021, après la présentation des arguments finaux des audiences d’extradition prévus pour la fin août. Trudeau voudra peut-être apporter une solution rapide à cette affaire, en sachant que les participants du 2 août ont promis de la soulever lors de sa campagne électorale encore hypothétique. Pour plus d’infos, veuillez contacter Ken Stone au 905-383-7693, 289-382-9008 ou à kenstone@cogeco.ca.

Inquiétudes face au racisme antiasiatique

Dans un article antérieur, nous relations qu’un millier de personnes se sont rassemblées au centre-ville de Montréal au premier jour du printemps 2021, à l’initiative du Groupe d’entraide contre le racisme envers les Asiatiques, de l’organisme Chinois progressistes du Québec et de Femmes de diverses origines, alarmés par le statut précaire des immigrantes asiatiques, par les sept féminicides en six semaines, par les fusillades dans des salons de massage asiatiques à Atlanta qui ont fait huit morts, dont six femmes d’origine asiatique et par de nombreux actes de vandalisme perpétrés dans le quartier chinois de Montréal. Selon l’article de Sarah Champagne, la conseillère de la Ville de Montréal Cathy Wong a affirmé que cette marche était un devoir d’histoire, avec Bochra Manaï, première commissaire à la lutte contre le racisme à Montréal, insistant sur son aspect systémique.

À mon avis, si le racisme antichinois s’est surtout envenimé au Canada par des sorties éditoriales diverses blâmant la Chine pour l’éclosion du coronavirus, en spéculant par exemple sur la docteure chinoise Xiangguo Qiu travaillant au Laboratoire national de microbiologie de Winnipeg (qui manipule les pathogènes les plus dangereux), on ne peut nier que la politisation de l’affaire Meng Wanzhou y a certes contribué : lire l’article  auquel certains ont reproché de ne pas appuyer les deux Michael emprisonnés en Chine; on l’avait pourtant fait le 24 juin 2020 [3].

On a besoin de l’appui des différentes personnalités mentionnées pour appliquer une saine pression démocratique sur le gouvernement pour qu’il libère enfin Meng Wanzhou.


[1] Le Service canadien du renseignement de sécurité

[2] A-t-il déclaré lors du Summit on Canada’s Global Leadership à Ottawa en novembre 2019.

[3] http://www.artistespourlapaix.org/?p=18904 L’orgueil des Freeland-Trudeau 24 juin 2020