elizabeth_maySortie des débats corsetés par l’influence du complexe militaro-industriel sur les médias, Elizabeth May n’a pas mis de temps à s’en libérer par une conférence de presse dès vendredi matin révélant les vraies affaires : elle semblait répondre aux six questions que les Artistes pour la Paix lui avaient posées [1], comme aux autres chefs, alors que jusqu’à présent, seuls le NPD et le Bloc avaient répondu. « Le Canada doit remettre en question sa place au sein de l’OTAN, l’alliance militaire de 29 pays qui devrait exclure la Turquie en raison de ses frappes contre le peuple kurde. L’OTAN correspond-elle à nos besoins stratégiques au 21e siècle ? » s’est interrogée Mme May, choquée par l’influence du président Trump « qui a dit clairement qu’il n’avait aucun intérêt à protéger la population kurde. C’est affreux.»

Sursaut antimilitariste du Parti Vert

Voici un graphique du Receveur général du Canada publié par la Voix des Femmes, nommément Tamara Lorincz et Janis Alton : ces femmes ont le courage de dénoncer là où nos élus libéraux et conservateurs ont prioritairement investi (gaspillé) depuis vingt-deux ans sous la pression du complexe militaro-médiatico-industriel aux mains des riches 1%. Or, qui menace davantage la sécurité du Canada ? Une invasion armée ou le climat déréglé ? L’écart abyssal que montre ce graphique entre la sécurité environnementale et le militarisme se répète dans une forme aggravée aux États-Unis et dans à peu près tous les pays du monde, sauf de rares exceptions tels le Costa Rica, le Bhoutan ou l’Islande.

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En rouge, les dépenses pour la défense; en vert, les dépenses en environnement.

C’est un sujet qu’épargnés par la couardise des journalistes institutionnels, aucun des « leaders » fédéraux canadiens ayant une chance de gouverner mardi le 22 octobre n’a abordé. Un bon point à Elizabeth May qui a confronté ces escrocs (« comment
osez-vous ? ») et tenté, coupée par le présentateur radio-canadien, d’aborder le sujet des traités internationaux biaisés, par exemple celui que la Chine a extorqué de Harper [2] mettant en danger notre environnement menacé par le pipeline TransMountain.

Vendredi 11 octobre, la cheffe du parti Vert, comme j’attendais en vain de sa part depuis notre première rencontre en 2007, a vigoureusement interpelé ses collègues politiques pour leur faire admettre que « le changement climatique est l’un des principaux facteurs d’instabilité mondiale croissante et qu’il est aussi la cause de désastres naturels et d’une hausse des conflits mondiaux autour des ressources ». Elle a, enfin, affirmé « qu’un gouvernement vert ratifierait le Traité sur l’interdiction des armes nucléaires et interdirait les armes autonomes, souvent appelées robots tueurs. Les verts annuleraient aussi le contrat de vente de véhicules blindés à l’Arabie saoudite et interdiraient l’importation de pétrole saoudien. »

La période qui s’ouvre sera passionnante

Notons au débat deux bons points pour Jagmeet Singh et Yves-François Blanchet qui ont mis K.O. les chefs conservateurs sur leurs pipelines (on souhaite que le Parti populaire s’informe sur le Prix Nobel 2019, le premier ministre éthyopien Abiy Ahmed Ali, qui a fait appliquer les priorités démocratiques et environnementales en son pays. Mais on n’a jamais parlé d’Afrique, un continent ignoré par Freeland et Trudeau et par les portions de débats consacrées à la politique étrangère !).

Avec sa sortie de vendredi, Mme May laisse derrière elle les deux autres chefs progressistes qui n’ont jamais abordé les sujets suivants dans les trois débats :

  • ni les bombes atomiques de l’OTAN et de neuf pays que le Traité d’Interdiction des Armes Nucléaires attaque courageusement, appuyé par la sortie unique de la Conférence des Évêques Canadiens (cliquez ici pour lire le document en entier) le 26 septembre dernier, boudée par les médias. Le traité est torpillé par le Canada de Trudeau qui, comme Harper avant lui, renie l’ONU heureusement bien défendue par Ray Acheson [3];
  • ni le nucléaire civil où Trudeau a sacrifié sa ministre de la Justice autochtone Jody Wilson-Raybould [4] parce qu’elle mettait le nez dans une compagnie, SNC-Lavalin, qui après avoir obtenu le monopole nucléaire par Harper, veut sous Trudeau construire à Chalk River un dépôt dangereux de déchets nucléaires toxiques à côté d’une rivière approvisionnant Ottawa et Montréal en « eau potable ».

 

Le vice-président des Artistes pour la Paix, André Jacob, avait fort bien dénoncé que LA PAIX était évacuée des débats [5]. Mais elle est maintenant sortie du sac. On attend des révélations dans les prochains jours, précipitées par le sort minoritaire qui attend les Libéraux effrayés par la perspective d’un gouvernement conservateur, s’ils refusent de sortir de leur torpeur corporative ou de leurs slogans vides « sunny ways ». Tant pis : on ne leur fera confiance que s’ils sont « checkés » et par le Parti Vert et par le NPD et idéalement, aussi par le Bloc Québécois et son chef éclairé, Yves-François Blanchet.


[1] http://www.artistespourlapaix.org/?p=17089

[2] http://lautjournal.info/20180608/trudeau-soumis-aux-petrolieres

[3] http://lautjournal.info/20190812/les-bombes-atomiques-ont-toujours-ete-une-question-de-pouvoir

[4] http://lautjournal.info/20191004/lart-inspire-parfois-les-meilleures-politiques

[5] http://lautjournal.info/20191007/la-paix-un-silence-genant-dans-le-discours-des-chefs-politiques