
Daniel Turp
Dans le cas de l’Arabie saoudite, la question ne se pose même pas : l’individu a les droits que veut bien lui accorder le souverain selon son humeur – ou celle de son « Comité pour la moralité et la répression du vice ». La loi canadienne pourrait faire une exception s’il était sûr et certain que ces blindés ne seront jamais utilisés contre la population du pays acheteur. Le doute est possible, étant donné que les blindés sont équipés de canons et de systèmes de missiles anti-char (selon le Globe & Mail), le genre d’armement qui n’est guère efficace contre une foule de manifestants, mais l’inverse est également difficile à établir.

Ceci est une Jeep…
Ce sont certainement plus que « des Jeep » – dès qu’on boulonne un canon sur une Jeep, une motoneige ou une planche à roulettes, celle-ci devient une arme, n’en déplaise à notre Premier ministre.
On pourrait donner raison à Stéphane Dion qui affiche un pragmatisme de rigueur. En effet, si le Canada devait cesser de commercer avec les gouvernements qui, par exemple, appliquent la peine de mort, il faudrait rayer plusieurs états américains de ses clients, en plus de nos amis wahhabites. Connaissant la rigueur de M. Dion, on se doute que ce n’est pas l’envie qui lui en manque, mais il manque d’arguments qui feront le poids face à la pression nationale et internationale. D’ailleurs, la population canadienne est partagée, comme au sujet de la cause similaire des F-35.

Stéphane Dion
Ceci ne fait qu’effleurer la surface du problème, et M. Dion le sait très bien. Un récent document de « briefing » préparé par le ministère des Affaires étrangères et déterré par la Presse Canadienne, recommande au gouvernement Trudeau d’intensifier ses relations avec l’Arabie saoudite pour se retrouver en position de force dans la région. Il fera ainsi copain-copain avec le Conseil de coopération du Golfe, dominé par les saoudiens, à un moment où cela pourrait devenir critique. En effet, l’exécution du cheikh Nimr al-Nimr pourrait, selon les fonctionnaires fédéraux, aggraver le conflit régional entre l’Iran et l’Arabie Saoudite déjà mené par personnes interposées au Yémen, en Irak et en Syrie. Sauf que le Canada veut être copain-copain avec tout le monde, lever ses sanctions contre l’Iran, y rouvrir l’ambassade et lui vendre des avions civils (qui portent le nom poétique de « Bombardier »…) Alors comment Justin Trudeau va-t-il faire ?
Stéphane Dion est assez sûr de lui pour ne pas se laisser influencer par les briefings et les lobbies, ce qui est loin d’être certain dans le cas du Premier ministre. Si je m’attarde à ce qui se passe derrière l’écran de langue de bois, ma vision est que M. Dion condamne autant la vente des blindés que les 47 exécutions, mais qu’il est coincé parce que General Dynamics Land System détient déjà les licences d’exportation pour les blindés. Il doit donc chercher une issue, et le projet juridique de M. Turp en est une toute indiquée. M. Dion pourrait ainsi agir avec élégance, gelant l’exportation des blindés pendant les procédures. Si M. Turp et ses partenaires gagnaient, il ne pourrait que s’incliner devant la décision de la Justice en retenant un sourire.
Monsieur Turp a donc besoin de tout l’appui moral et concret possible, à commencer par celui des Artistes pour la Paix. Si quelqu’un est capable de mener à terme cette complexe démarche juridique, c’est bien lui, qui a déjà contesté en 2011-2012 le retrait du Canada du protocole de Kyoto – ce qui en fait a priori un allié de M. Dion.
De plus, ce qui devrait encourager les APLP, M. Turp est un fervent mélomane connaisseur d’opéra (et pas des moindres – voir son blog en cliquant ici).
Questions subsidiaires : dans ce dossier, le syndicat des travailleurs de General Dynamics Land Systems penche de quel côté ? Traditionnellement alignés sur des idéaux pacifistes, fait-il montre du même pragmatisme situationnel que M. Dion ? Imaginons un instant le coup de théâtre si les travailleurs de GDLS refusaient de fabriquer les blindés au nom de la paix !
Rappelons qu’on n’en serait pas là si la position des Artistes pour la Paix annoncée dès février 2014, c’est-à-dire il y a DEUX ANS, avait été publiée ailleurs que sur notre site : voir http://www.artistespourlapaix.org/?p=4994
Pourquoi les valeureux pacifistes d’occasion ne s’étaient-ils pas manifesté alors pour bloquer la transaction ou du moins la dénoncer? Avait-on davantage peur du PM Harper, que du PM Trudeau?
Il est vrai que les protestations ont commencé seulement en 2015, après l’indignation soulevée par la guerre au Yémen et les coups de fouet administrés au malheureux blogueur Raïf Badawi.
J’avais partagé sur mes deux pages facebook cet article que tu as mentionné et il semble qu’ilo est exact de dire les médias d’information soient soient frileux de publier les articles. Cela, j’en conviens et c’est pour quoi j’aime publier ce qu’eux ne font pas. Néanmoins je salue Daniel Turp qui a décidé d’agir afin de blioquer cette vente dans un pays irrespectueux des droits humains en gonctionde la déclaration universelle des droits de l’homme ou des humains.
Il est plus intéressant d’investir dans l’éducation, la santé,la justice sociale et les arts, les sports et la culture iou la contre culture que dans l’industrie militaire qui ne résoud rien on le voit bien PLuas le temps avance depuis 2001 et plus il y a de tension.
Intéressante approche qui va avoir le mérite de faire parler du sujet et , sait-on jamais , de faire jurisprudence. Il serait tout indiqué de faire écho des travaux de Mr. Turp et de son équipe sur ce site.