Par Sean Howard (Pugwash Canada) – addendum par vos APLP

ministres otan bruxelles

Le ministre des Affaires étrangères de l’Ukraine Dymtro Kulebo et le Sec. Gén. de l’OTAN Jens Stoltenberg à Bruxelles

(…) Le Pape a courageusement expliqué « nous ne voyons pas l’étendue du drame caché derrière cette guerre en Ukraine, sans doute provoquée ou non empêchée ». Quelques mois auparavant, le pape a révélé avoir discuté de la crise avec un « sage qui parle peu » qui lui a avoué « sa vive inquiétude face aux manœuvres de l’OTAN »; à sa demande pourquoi, l’homme mystérieux a répliqué : « l’OTAN aboie devant les grilles de la Russie. » Ces sages paroles ont évidemment été noyées, comme toute autre mention que l’expansion de l’OTAN aurait joué un rôle d’alimenter la crise, huées en tant qu’« une désinformation russe ». Et dans la cacophonie ambiante, il est difficile d’imaginer un son plus sinistre que le ronronnement de satisfaction des dirigeants des compagnies d’armements.

Il y a cinquante ans, se référant au scandale du Watergate qui a détruit Richard Nixon, l’avocat de la Maison Blanche, John Dean, déclarait : « Il y a un cancer à la présidence ». Il y a aussi un cancer qui ronge les États-Unis, une économie de guerre permanente métastasée qui, pour citer le commentateur progressiste Chris Hedges, « a détruit l’économie privée, mis la nation en faillite et gaspillé des milliards de dollars des contribuables » dans la poursuite dévote de la religion nationale, démocrate ou républicaine, peu importe : la guerre est la raison d’être [1] de l’État… piégé dans la spirale mortelle d’un militarisme incontrôlé.

Hedges écrivait ceci, quelques jours après le « vote quasi unanime » – pas un seul vote démocrate contre, ni à la Chambre ni au Sénat ! – d’envoyer $40 milliards à l’Ukraine, « la plupart de cet argent dans les poches des industries de guerre. » Cette somme énorme, craint-il, « n’est que le début », avec de nombreuses prédictions d’un conflit « long et prolongé » avec « des injections mensuelles de 4 ou 5 milliards de $ d’aide militaire ».

Hmmm, environ un milliard de dollars par semaine : je me demande à quel point une telle somme paraît absurde à Michael Dunford, directeur régional du Programme alimentaire mondial des Nations Unies (PAM) pour l’Afrique de l’Est, qui a révélé le 22 juin que son organisation n’avait « reçu que 3 % des fonds de 6 milliards de dollars réclamés pour l’Éthiopie, la Somalie et le Soudan du Sud », trois pays largement – la Somalie, entièrement – dépendants des céréales ukrainiennes et russes. Les agences d’aide craignent une famine somalienne pire qu’il y a dix ans, quand un quart de million de personnes sont mortes : bien plus que toutes les victimes prévisibles de la guerre en Ukraine (à moins, bien sûr, qu’elle ne se propage et ne devienne nucléaire).

« Nous voyons », désespère Dunford, « … des enfants qui meurent sous nos yeux, des populations qui ont perdu leurs moyens de subsistance. Ce n’est pas que nous n’avons pas appris les leçons de 2011 ; il y a eu beaucoup de très bons apprentissages… C’est juste que nous n’avons pas pu le mettre en œuvre à cause du manque de financement ».

Cette année fiscale, le Pentagone dépense environ 84 millions de dollars par heure, 2 milliards de dollars par jour et, chaque semaine, plus du double du montant demandé par le PAM pour lutter contre la famine dans ces trois pays pendant un an. Le sommet 2021 du G7 au Pays de Galles a promis (et n’a pas livré entièrement) un total de 7 milliards de dollars pour le soulagement de la famine dans le monde, c’est-à-dire moins d’argent que le Pentagone n’en brûle toutes les 100 heures. Et incroyablement, le sommet de cette année en Allemagne – un sommet alpin, loin des manifestants – a promis encore moins, 4,5 milliards de dollars, « bien en deçà », comme l’a noté le Guardian, des attentes de l’ONU.

L’article de M. Howard se poursuit avec un compte-rendu de l’action pacifiste positive de Ray Acheson (WILPF) qui rallie à la paix bien des mouvements féministes et LGBTQ…

Addendum canadien par les APLP

Le Canada est maintenant esclave de l’OTAN très occupée à le persuader, ainsi que la Finlande, la Suisse, l’Allemagne et la Grèce, d’acquérir des F-35 qui volent (volent-ils?) en Australie, aux États-Unis, au Royaume-Uni et en Italie. Comme écrivait Julien Arsenault (La Presse, 16 avril), l’avion furtif, présenté comme le plus avancé d’un point de vue technologique, ne s’est encore jamais retrouvé en situation de combat. Néanmoins, le Canada négocie avec Lockheed Martin pour finaliser malgré nos cris d’alarme l’acquisition de 88 avions de combat F-35 au coût de 19 milliards US (chiffre insuffisant affiché, qui plus est d’avant inflation),

  • alors qu’il n’y a aucune garantie que l’entretien et la formation pour ces appareils s’effectueront au Québec – la CAE et le Bloc s’en inquiètent;
  • alors qu’on rapporte des centaines de défaillances dont certaines jugées mortelles.

 

On découvre des vulnérabilités informatiques et autres dans un rapport du très fiable U.S. Government Accountability Office qui s’alarme des coûts annuels de maintenance (non inclus dans le chiffre de 19 milliards) devant grimper à un astronomique milliard de $ pour chaque appareil dès 2028, en inflation des $315 millions de 2021 !

La « disponibilité » des F-35, qui a « plafonné en 2021 », où le taux [2] s’établissait aux États-Unis à 61 % l’an dernier, en deçà de l’objectif de 65 %, une cible déjà basse selon les experts, devrait réjouir les pacifistes. Les experts craignent que si les avions ne peuvent pas décoller quand on en a besoin, c’est du gaspillage d’argent; nous on pense qu’on n’en a pas besoin et que c’est anyway du gaspillage d’un argent nocif destiné à créer davantage de millions de réfugiés de guerres, tout comme les frégates Irving/Lockheed, qui dépassent les 100 milliards de $, autre décision de votre gouvernement fédéral militariste appuyé par le NPD et critiqué par le conservateur Poilièvre pour ses dépenses militaires… insuffisantes.

PS Avec cinq cents membres, je vous assure qu’on entendrait les APLP ! PJ


[1] En français dans le texte

[2] Le taux de disponibilité correspond au pourcentage d’appareils aptes à réaliser des missions et qui ne sont pas dans un centre de maintenance.