Serge Lavoie 'Jos Guitare' Photo: Marie-Josée Lemieux

Serge Lavoie ‘Jos Guitare’
Artiste pour la paix 2013
Photo: Marie-Josée Lemieux

« Le gratteux de guitare » Serge Lavoie se retrouve désigné artiste pour la paix 2013 par le conseil d’administration de treize membres présidé par Guylaine Maroist. On se souviendra qu’agressé par la matricule 728 à l’automne 2012 dans son studio, Serge Lavoie a, grâce à une invitation de Jocelyne Bilodeau, directrice du Gésu qui lui ouvrit ses portes, répondu le 8 octobre 2013 par une exposition et un concert organisés par son collectif d’artistes de la Casa obscura (l’Amicale de la culture indépendante).

Voici comment Brigitte DesRosiers, secrétaire des Artistes pour la Paix, l’a présenté, le 14 février dernier, à la Chapelle Historique du Bon-Pasteur devant près d’une centaine de collègues et amiEs:

« Un jour, à la télé, le Québec en entier a vu une paire de lunettes rouges taper les murs d’une cage d’escalier, comme une balle de ping-pong. Le Québec a vu aussi que derrière cette paire de lunettes, il y avait un gars, une belle âme, oserais-je dire, en train de subir une violence policière abjecte et absurde. Cette belle âme, c’est Serge Lavoie que les APLP sont fiers de nommer Artiste pour la paix de l’année 2013.

Pourquoi? D’abord, ne l’oublions pas, avec ces lunettes rouges, c’était aussi toute une série de lunettes multicolores visées par cette violence et ce mépris, tous ces gratteux et gratteuses de guitare, de toile, de papier, ces artissssss, ceux qui ont mis la poésie et parfois aussi, avouons-le, l’indignation et la révolte au cœur de leur printemps, qui ont reçu cette charge injustifiée. Les Artistes pour la Paix se sont sentis concernés, mais pour nous, ce qui a compté surtout, ce que nous voulons souligner, c’est comment Serge Lavoie a su, avec une résilience extraordinaire, transformer cette violence en quelque chose de positif.

Comment? Je sais que deux choses ont été essentielles à cette résilience: la musique (l’art) et les amis. L’art peut être plein de choses: il peut éveiller les consciences, il peut choquer, il peut émerveiller. Il peut nous renvoyer à des expériences individuelles et subjectives. Mais il peut aussi rassembler. Il peut créer des liens.

Et c’est ce que Serge a réussi en organisant un concert et une exposition au Gésu, avec ses amis, pour dire: ce que nous faisons est noble et important. Il s’agit de dire que l’art peut être là aussi pour nous aider à traverser des traumatismes individuels et collectifs.

En nommant Serge Lavoie Artiste pour la paix de l’année 2013, les APLP veulent célébrer, comme source de paix, cette magnifique union de l’art et de l’amitié.

Brigitte DesRosiers, amie des APLP, membre du CE, CA

Brigitte DesRosiers, amie des APLP

Martin Léon

«Serge, c’est un réel agent de la paix», a mentionné avec ironie et affection son collègue musicien Martin Léon. «Il y a toujours un projet social qui implique le monde et brise la solitude dans la poche arrière de Serge Lavoie», a-t-il ajouté, en rendant hommage au sens de la solidarité de son ami, de son humanisme, de son talent à la guitare jazz et de sa perpétuelle bonne humeur, hélas mise en danger pendant un an. Catherine Chantal-Boivin (QMI, Journal de Montréal) a justement transcrit les paroles de Martin : «Serge a été le premier à pardonner à la policière et à dire qu’il s’agissait d’une femme qui avait besoin de ressources». S’il a décidé d’entreprendre des actions en justice contre le matricule 728, Serge Lavoie trouve le processus très difficile: «J’aurais préféré ne pas avoir à le faire, mais je le fais pour que ce genre d’événement ne se reproduise plus», a mentionné le musicien. Pour se faire pardonner de Stéfanie Trudeau, l’auteur-compositeur-interprète a choisi la voie musicale: «J’ai transposé les trois chiffres de son matricule en notes de musique et j’en ai fait une mélodie aux vertus pacificatrices ».

Puis Serge a évoqué, le ton assombri, la mort scandaleuse par balles d’Alain Magloire, qui lui semble évitable dans une société aussi paisible que la nôtre. Le tout s’est terminé dans les larmes et par le rassemblement sur scène des divers lauréats, émus.

On lira ou écoutera le témoignage des Artistes pour la Paix commentant le travail des policiers à la Commission du printemps 2012 dans notre section « l’art et la répression » ou en allant sur http://artistespourlapaix.org/?p=2987.

Dans une entrevue le 17 février à Médium Large, l’émission du matin de Catherine Perrin à Radio-Canada, Serge expliqua avec douceur que profondément traumatisé par cette agression, réunir une quarantaine de guitaristes en spectacle l’a aidé en quelque sorte à sa propre thérapie par l’art.

On peut voir un reportage télévisé sur le 14 février dans le lien suivant:

ICI Radio-Canada Télé – Le Téléjournal du Grand Montréal (18) visuel de l’événement

Capsule de Louise Rousseau sur Serge Lavoie, exactement à 40’15 » de l’émission

http://ici.radio-canada.ca/audio-video/#urlMedia=http://www.radio-canada.ca/Medianet/2014/cbft/2014-02-14_18_00_00_TJ18H_0005_500.asx&pos=0

 

Photo: Mélanie Ladouceur

Photo: Mélanie Ladouceur

De gauche à droite, le militant irano-québécois Amir Maasoumi, l’artiste Dominique Blain, la secrétaire Brigitte DesRosiers, l’artiste multidisciplinaire Hervé Fischer, madame Nathalie Gressin veuve d’Arthur Lamothe, la présidente Guylaine Maroist au centre, les musiciens Martin Léon, Serge Lavoie et Pierre Jasmin, Fabienne Larouche et le maître de cérémonie Domlebo.

Vous pouvez visionner les photos de l’Événement ici:  Photos de Valery Latulippe.

La présidente Guylaine Maroist avait entrepris la soirée par un éloquent discours :

« Ça fait 30 ans que les Artistes pour la paix existent. En 1984, on est en pleine guerre froide. Ronald Reagan relance la course aux armements avec l’URSS. Partout on a peur que des missiles nucléaires nous explosent sur la tête. Des artistes de la Suède et la Norvège s’unissent et fondent le mouvement Artists For Peace, présidé par l’actrice Liv Ullman, rejointe par Harry Belafonte. Au Québec, Gilles Vigneault, Margie Gillis, Raoûl Duguay, Yvon Deschamps, Judi Richards et plusieurs autres artistes ouvrent la branche québécoise et commencent aussi à militer. L’action de ces artistes combinée à celle d’autres activistes, entre autres de Pugwash, fait en sorte qu’un traité pour réduire l’arsenal nucléaire est ratifié entre les 2 nations.

Au fil des ans, d’autres artistes ont gagné le mouvement, comme Frédéric Back, Magnus Isaacson et plusieurs autres en apportant avec eux de nouvelles préoccupations comme le respect de l’environnement et la justice sociale.

Les Artistes pour la paix, c’est donc en 1987 Frédéric Back qui donne envie au monde entier de planter un arbre. C’est en 89, Antonine Maillet, alors présidente des APLP, qui rencontre Brian Mulroney pour le convaincre d’annuler l’achat de sous-marins nucléaires. C’est lors de la crise d’OKA Gilles Carle et Arthur Lamothe qui vont porter des fèves, des courges et du maïs aux femmes Mohawks. C’est en 1991 Richard Séguin qui organise un spectacle avec ses amis Michel Rivard, Florent Vollant, Maryvonne Kendergian et Pierre Dansereau pour dénoncer la Guerre du Golfe. C’est en 93 et 94 Pierre Jasmin qui se joint à une flottille et à une caravane de la paix en Croatie et au Tibet. C’est Dominique Champagne qui rassemble 250 000 personnes sur le Mont-Royal pour le Jour de la terre 2012.

Ce sont des créateurs qui nous prouvent que l’art et la culture sont des armes de construction massive. Nous en avons besoin plus que jamais. L’an dernier, on a dépensé 1756 milliards de dollars dans le monde en achat d’armement, 682 aux Etats-Unis. Évidemment la Chine et la Russie veulent les rattraper en augmentant leurs dépenses d’une manière fulgurante. On va avoir besoin très sérieusement de renfort aux Artistes pour la paix…

On va avoir besoin d’artistes pour nous montrer que l’art ne sert pas seulement à nous divertir ou à faire vendre des marques mais aussi à nous réveiller, à nous faire agir, à nous conscientiser.

À chaque année depuis 1989, le 14 février, fête de l’amour, est prétexte pour les APLP d’honorer un artiste ou un collectif d’artistes dont l’art ou/et la vie témoignent en faveur de la paix et de la justice sociale. En novembre, le conseil d’administration procède à la sélection d’un ou de candidatEs de toutes disciplines artistiques qui se sont illustrés-es au cours de l’année par leurs réflexions, créations ou actions ayant prévenu un conflit en l’identifiant ou ayant fait la promotion de la paix.

La fête du 14 février aux Artistes Pour La Paix
Jacques Lussier, Maryvonne Kendergian, Armand Vaillancourt puis de gauche à droite en arrière : Jean-Louis Roux, Paul Klopstock, Martin Duckworth en 1997 (?)

Réuni le 4 novembre dernier, le conseil d’administration a choisi les artistes à qui on décerne un hommage pour toute une vie au service d’une forme de paix, ainsi que le prix Artiste pour la Paix de l’année 2013 dévoilé le 14 février. Participent à la fête Jean-François Garneau, nouveau vice-président, Valéry Latulippe, webmestre, Diane Croteau, trésorière, ainsi que les artistes Izabella Marengo, Lady Sylva, Geneviève Soly, Annie Roy et Pierre Allard, Marcel Saint-Pierre, Romain Pollender, le maître de cérémonie Domlebo et d’autres membres du C.A. des Artistes pour la Paix.

Voici les lauréats des années passées Artistes pour la Paix de l’année:

l’auteur-compositeur-interprète Daniel Lavoie (1988),

la comédienne Andrée Lachapelle (89),

l’auteur-compositeur-interprète Richard Séguin (90),

l’écrivaine, feue Simonne Monet-Chartrand (91),

le compositeur Gilles Tremblay (92),

le sculpteur Armand Vaillancourt (93),

l’auteur-compositeur-interprète Florent Vollant et le sculpteur Alex Magrini (94),

l’auteure-compositrice-interprète Marie-Claire Séguin (95),

la costumière et directrice de l’Espace Go Ginette Noiseux (96),

l’organisme international Clowns sans frontières (97),

la photographe Josée Lambert (98),

la cinéaste Marquise Lepage (99),

l’artiste-peintre feue Marcelle Ferron (2000),

l’homme de théâtre Jean-Claude Côté (2001),

le cinéaste Martin Duckworth (2002),

la chanteuse Karen Young (2003),

l’animatrice feue Myra Cree (2004),

Mira Cree, Artiste pour la paix de l'année 2004
Monique Giroux (à droite) remettant la plaque pour l’Artiste Pour La Paix de l’année 2004 à (?) pour Myra Cree qui nous avait quittés quelque temps avant la cérémonie du 14 février.

le comédien Luc Picard (2005) entouré ici par Marie-Claire Séguin et Ginette Noiseux,Luc Picard, artiste pour la paix de l'année 2006

le dramaturge Wajdi Mouawad (2006),

le comédien et chanteur Dan Bigras (2007),

l’ATSA (Annie Roy et Pierre Allard) (2008),

Chloé Sainte-Marie (2009),

la comédienne Pascale Montpetit (2010),

le metteur en scène et auteur Dominic Champagne (2011),

la cinéaste et auteure Anaïs Barbeau-Lavalette (2012)

et cette année le musicien Serge Lavoie (2013).

 

Des hommages furent aussi rendus (voir article suivant)