Finie l’inertie

Le 11 janvier 2013, une délégation d’Artistes pour la Paix formée de leur président Daniel-Jean Primeau (avec Julie), de leurs deux vice-présidents Manon Cousin et Pierre Jasmin, de leur secrétaire André Cloutier ainsi que de Diane Croteau, Claudia Léger (avec Guillaume), Michèle Soucy et Alain Lalonde a répondu à la généreuse invitation de Stuart Miyow Jr avec deux mères du clan du Loup (+ leur sœur mexicaine) à venir partager le souper-potluck du samedi soir à Kahnawakeh, en compagnie de Stuart Sr et d’Yvan Bombardier, de la nation métis. Stuart Miyow jr a prononcé un long discours d’une heure où son concept d’équilibre entre la Femme et l’Homme basé sur le matriarcat présent depuis des lunes chez les Mohawks (« Gayandawana ») nous a vivement émus.

Lettre envoyée le lendemain par les APLP en remerciement pour cette soirée lors de laquelle notre secrétaire a remis en cadeau quatre affiches de paix.

Wahehshon
>Mohawk Traditional Council
>Kahnawakeh Mohawk Territory
>www.mohawktraditionalcouncil.org
>
longhouse@mohawktraditionalcouncil.org

Good Day, Wahéhshon

On behalf of the members and friends of les Artistes pour la Paix, all of whom attended this remarkable evening of yesterday at the Mohawk Traditional Council, I wish to express my wishful thanks and best regards to you and all your people who welcomed us so warmly.

I sincerely believe this was the first of many meetings through which we will collaborate to offer a better future to our Mother Earth and her children.

I will get in touch in the near future for your ideas in creating our web portal, as well as the project of a sculpture on the pylon between the two bridges over the St. Lawrence river. I also think some of us will be enthusiastic to help your video project mentioned by Stuart Jr during his speech.

Sincerely and peacefully,

Daniel-Jean Primeau

President Les Artistes pour la Paix

Cette solidarité exprimée par les APLP à l’égard de leurs frères et sœurs amérindiens, même si les membres du clan du Loup semblent ne pas vouloir participer au mouvement idle no more qu’ils trouvent aussi mal organisé que Occupy Wall Street (Stuart s’était rendu à New York), couronnait une semaine entière de manifestations pan-canadiennes, une journée après la rencontre de plusieurs heures entre le premier ministre Stephen Harper et une délégation de chefs autochtones, dont Ghislain Picard, chef innu. Depuis une semaine à la télévision, ont pris la parole des amis des APLP, tels Michèle Audette, présidente de l’Association des femmes autochtones (avec qui nous avions amadoué la vice première ministre du Québec, Lise Bacon, en 1988) et Konrad Sioui (un des cinq commissaires de l’Enquête sur la paix et la sécurité 1992 alors co-organisée dans les locaux des Artistes pour la Paix).

Cette solidarité ne date donc pas d’hier. Elle s’est exprimée par des films inoubliables sur les Innus par celui qui siégea sur le conseil d’administration des APLP de nombreuses années, Arthur Lamothe (réalisateur aussi de l’écho des songes, film sur l’art amérindien) et par des actions de solidarité avec les femmes Mohawks de Kanehsatake pendant la crise d’Oka : courges, fèves et maïs offerts par Gilles Carle et Arthur Lamothe à feue Myra Cree (APLP2004) et à Monique Giroux, toutes deux animatrices à Radio-Canada. Les femmes mohawks donnaient des taloches aussi bien aux membres de la Sûreté du Québec qu’aux Warriors. Le film Kanehsatake, 270 ans de résistance d’Alanis O’bomsawin, qui a alors quitté le conseil d’administration des APLP pour filmer à l’intérieur des barricades, montra la crise d’Oka du point de vue subjectif Mohawk; tandis que les APLP, fidèles à leur charte qui leur impose plus de neutralité, tentaient des médiations et s’occupaient principalement à aider, dans des échafaudages tout le long du mois d’août, à la réalisation d’une murale, coin Cherrier et St-Denis, par l’artiste d’origine amérindienne Sabrina Mathews. Intitulée Nitassinan, notre terre, la murale dépeignait les ravages des vols militaires à basse altitude de l’OTAN sur les caribous et le mode de vie ancestral des Innus, le tout surmontant un poème de l’artiste pour la paix François Charron.

Notre solidarité s’est aussi exprimée, évidemment, par d’autres projets artistiques, tels le wampum symphonique de Gilles Tremblay (APLP 1992) interprété par Charles Dutoit et l’OSM sur toutes les radios francophones du monde, et la chanson le son des songes composée par Richard Séguin (APLP1990) suite à son séjour à Malioténam avec Florent Vollant (APLP1994), avec la participation de la chanteuse artiste pour la paix Claire Pelletier.

Marie-Claire Séguin (APLP 1995), métis tout comme son frère jumeau Richard et comme feu notre secrétaire Bruno Roy, et Chloé Sainte-Marie (APLP2009), avec son avant-dernier CD exclusivement en langue innue, ont entretenu la flamme de la solidarité amérindienne, tout comme de nombreuses soirées Trois arts pour la paix, avec les présences de l’anthropologue Serge Bouchard, du chanteur Bob Bourdon (Robert Seven-Crows) ainsi que du rapper Samian (concerts en mémoire de John Lennon et Yoko Ono au Musée des Beaux-Arts de Montréal), issu des wakiponi mobiles de Manon Barbeau.

Pierre Jasmin et Daniel Gingras avaient su trouver une place à Stuart Miyow Jr lors du spectacle des APLP à la Place des Arts à l’occasion du 25e anniversaire de Tchernobyl (26 avril 2011), et il nous avait rendu la pareille deux mois plus tard, grâce toujours à l’intercession de Raymond Stone Isaawa, lors de la manif en rabaska à Champlain devant la centrale de Gentilly 2.

La paix doit triompher des dissensions profondes dont les racines plongent hélas loin dans notre histoire commune, dont voici un trop court rappel.

D’une part, les Québécois s’enorgueillissent à bon droit de rapports moins conflictuels avec les autochtones que ceux qu’ont eus les Espagnols, les Américains ou les Anglais du Canada. Si on tient à remonter à Dollard des Ormeaux et aux missionnaires Lallemand et Brébeuf (!), on trouvera en contrepartie l’ouverture de Marie de l’Incarnation si bien mise en valeur par Jean-Daniel Lafond et Marie Tifo. Mais nous pensions plutôt à la Paix des Braves signée par Bernard Landry avec les Cris: ce traité lui assurera une place sympathique dans l’histoire du Québec (et du Canada), tout comme pourrait le faire le respect des Cris et de leur volonté de garder Matoush et les monts Otish loins de l’industrie uranifère pour Pauline Marois.

D’autre part, le Canada nous a rendus complices de sa propre histoire :

1- La Proclamation royale de 1763 reconnaissait des droits autochtones sur leurs terres ancestrales. La conquête de l’Amérique I par Arthur Lamothe a filmé les explications de notre ami anthropologue Rémi Savard, avec entre autres ce wampum à deux voies brodé de perles, comme celui brandi par Stuart lors de notre rencontre, symbolisant le rêve autochtone d’une relation respectueuse de nation à nation, de deux peuples acceptant de vivre côte-à-côte.

2- En 1867, la Confédération canadienne, adoptée sans consultation des peuples autochtones, voit le gouvernement fédéral hériter des “affaires indiennes” qui placent les autochtones en tutelle permanente et visent leur assimilation. Leurs enfants sont placés en d’infâmes pensionnats pour les christianiser et leur faire oublier leur langue. Le gouvernement Chrétien fera cesser ces infamies et celui de Harper aura le mérite de présenter des excuses officielles au nom de tous les Canadiens.

3- En 1990, la Crise d’Oka est « réglée » par l’armée, heureusement commandée par le général Chastelain dont l’objectif premier restait de ne recourir à aucune violence mortelle ; le ministre québécois Ciaccia n’avait pas les coudées franches pour ce faire, malgré l’appui de son premier ministre Robert Bourassa amoindri par la maladie.

4- Suite à quoi, le gouvernement du Canada instaure la Commission royale d’enquête sur les peuples autochtones, avec René Dussault et Georges Erasmus : leur excellent rapport, hélas tabletté, présentait pourtant certaines solutions viables.

5- Le premier ministre Paul Martin en tiendra compte dans son Traité de Kelowna prévoyant cinq milliards de $ de dépenses en santé et en logements, avec un solliciteur général autochtone pour assurer l’imputabilité des dépenses.

6- L’arrivée au pouvoir de Stephen Harper annule le traité de Kelowna et affecte ses milliards à l’armée. son gouvernement tentera d’ignorer La Déclaration sur les droits des peuples autochtones de l’ONU pourtant ratifiée par 143 pays en 2007, sauf le Canada, les États-Unis, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Les Artistes pour la Paix écrivent leur honte face à leur gouvernement, avant qu’il se ravise trois ans plus tard et ratifie la Déclaration.

7- IDLE NO MORE (FINIE L’INERTIE) surgit sous la pression de quatre femmes autochtones de la base, appuyées par la grève de la faim de la cheffe Theresa Spence de la nation Attawapiskat (au nord de l’Ontario, où les conditions de vie, – logements sans eau courante ni électricité – ont été dénoncées par un comité de l’ONU).  À quoi le gouvernement conservateur riposte en dénonçant l’ONU (!) et la soi-disant incurie amérindienne, alors que c’est ce même gouvernement qui a refusé d’instaurer le traité de Kelowna qui aurait assuré un début d’imputabilité, en accord avec les conseils de bande consultés. Des médias (avec l’habituel nationaliste que certains accuseraient d’être raciste, Gilles Proulx, qui avait fait des ravages pendant la crise d’Oka) tentent de réduire Idle no more à une immature révolte informe et sans lendemain.

8- Mais aujourd’hui 16 janvier, des manifestations ont lieu à la grandeur du Canada et le 28 janvier, jour de la rentrée parlementaire à Ottawa, s’annonce houleux, à moins que le gouvernement commence enfin à prendre ses responsabilités: Michèle Audette supplie Harper et le gouverneur général de rencontrer la chef Spence le 24 janvier.

Les Artistes pour la Paix déclarent leur solidarité avec le mouvement dont une des représentantes a appelé aujourd’hui à la non-violence : pas de blocages de routes ou de voix ferrées car trop susceptibles d’entraîner de la violence, mais ralentissement du trafic et conscientisation des citoyens rencontrés. Conscientisation, par contre, de tant de problèmes que l’unité sera difficile à préserver face à la propagande gouvernementale qui a repris sa tactique préférée, celle de salir l’adversaire plutôt que de défendre ses positions…

FINIE L’INERTIE!

Pierre Jasmin

qui remercie Alain Lalonde

Voici maintenant une lettre qui date du 15 janvier

Dear Friends:

Attached and pasted below you will find the text of an open letter from Attawapiskat Chief Theresa Spence to her fellow chiefs and grand chiefs.

I’m glad she has released this letter and I’m glad to be able to read (and to share) her words directly, unfiltered by the corporate media. I find it very helpful and moving to read what she has to say.

Blessings,
John

John Bird, Program Coordinator
Aboriginal Justice and Right Relations
United Church of Canada
3250 Bloor St. W., Suite 300, Toronto, ON  M8X 2Y4
416-231-7680 or 800-268-3781, Ext. 4045
Cell: 416-988-5310
jbird@united-church.ca

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Victoria Island, Ottawa, January 15, 2013
Att.: All First Nations Chiefs and Grand Chiefs
Re: Status of Hunger Strike and National Leadership Situation

Dear Chiefs and Grand Chiefs;

Today marks the 36th day of my hunger strike, 35th day for Mr. Raymond Robinson of Manitoba and yesterday Mr. Jean Sock from New Brunswick was his 28th day and his last. We owe a great depth of gratitude to Jean for his support by joining me and Raymond in our protest. In return we extend our full support and we respect his decision to end his hunger strike to attend to his ailing mother, and also to be with his youth who are struggling to comprehend our cause. We pray for his complete recovery and we send prayers to his mother, his family and to have a safe journey home.

With this letter, I want to make it clear once again the purpose of our hunger strike as well as to inform all of you the state of my health and Raymond. We also wanted to take this opportunity to express our position of the events leading to the meeting of January 11, 2013 and the current situation we are in.


As I stated from the beginning, something had to be done to bring our Nations immediate needs, treaty implementation issues among many other issues to the brought attention of the PM along with the Crown in meeting on Nation to Nation basis at the earliest time possible.
Now, that the meetings with the PM and the Governor General have taken place, despite the fact that the Chiefs met with them separately, like many of you the confusion has yet to subside as I continue to wait for the details in what was actually achieved. It is without a doubt, the events leading up to the meeting of January 11, 2013 with the PM and the evening with the Governor General, as well as the communication breakdown that day and into that night truly tested our unity once again.Along with Mr. Raymond Robinson, Mr. Jean Sock and I, we call on all of you not to waste any more energy on determining the future of our National Chief – for what took place for the past month is beyond us all as individuals. We all began with a purpose, we had a plan, we need now to refocus and stick to the original plan to propose and follow our own agenda. This is our best chance to settle the struggles our Nations have had to endure for far too long.

We need the National Chief as much as we need each other. With the challenges ahead, we need to spend less energy fighting amongst ourselves; instead we must focus on finding a common ground, a common understanding and respecting each other’s goals and objectives. We must stand united, strengthen our unity and agree on an agenda that works for all of us and not just the few. The politics within our camp can wait and work itself out on its own time.

What we have endured here at the island is a small price to pay compared to what our ancestors, our own mothers and fathers endured. Putting aside the real purpose of our hunger strike, this was our way to pay tribute to our ancestors who have forgone some of the harshest periods in our history, to honor those among our Nations who continue to struggle for the basic standard of living to this day, as well as to raise new hope among our youth and to protect our future generations.

From the beginning, the support and prayers from all of you, from our grassroots, elders, women and particularly the youth brought us comfort and assurance that we are all in this together. This must continue.

Many of you have asked me directly or called on us indirectly to stop our hunger strike, but as we stated before, our exit or to end this hunger strike will be on our own terms. We ask all of you to respect that and ask you to refocus on the spirit and the intent of this movement.

Together, meaning the Idle No More movement, as hunger strikers, others who are fasting for the same cause with the support of our grassroots, our protesters, you the leaders, we have all been part of something historic which brought in all of us a sense of pride; our people have come together in solidarity for a common cause. The citizens of this country have also taken notice and we have their attention. Soon the rest of the world must be informed and this Government along with the Crown must accept that the only way forward in this country is a renewed relationship with First Nations, but that it must begin with in a meeting with both the PM and Governor General present.

We are honored to be able to contribute to raising awareness of our Nations pressing issues, past and current struggles, as well as the challenges ahead. As more protests are being scheduled, we hope that the peace be maintained and ask all of you to encourage your members to remain peaceful and respectful.

Furthermore, we acknowledge and respect the Idle No More movement, their founders and spokespeople for promoting awareness of the controversial omnibus bills recently passed in the Senate. Our fights may be different, but our dreams and hopes for our people are common.

We will assess carefully our next steps in the coming days and will continue to remain optimistic. Our spirits are up, but we are growing weaker by the day but we do our best to maintain our health. We ask you to respect our choices and to leave us the decision when and if this hunger strike should end.


My fellow Chiefs, on behalf of Mr. Robinson and Mr. Sock, we thank you for your continued prayers and support. We ask you now to focus on the task at hand and please do not to worry about us; our people and our youth deserve real change and nothing more. May the Creator guide us through the challenges up ahead.
Gichi Meegwetch,
Chief Theresa Spence
Attawapiskat First NationCc: Shawn Atleo, AFN National Chief
All AFN Regional Chiefs

Et le 24 janvier, cette crise s’est réglée grâce à la solidarité des chefs des partis d’opposition avec les grands chefs autochtones qui ont assuré Theresa Spence de leur appui à ses objectifs. Elle a ainsi mis fin à sa grève de la faim.