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Nathalie Provost, militante auprès de Polysesouvient.

Le gouvernement du Canada multiplie les annonces à Radio-Canada vantant avec complaisance sa lutte contre les armes à feu, au moment où des échanges mortels de coups de feu n’épargnent ni Rivière-des-Prairies, ni Saint-Michel, ni Montréal-Nord, ni même Longueuil. La publicité complaisante est dénoncée par nos amis de Polysesouvient. On vous en avait touché un mot au printemps dernier [1].

Loi C-68

Nos membres reliront d’abord notre article du 1er mai 2020, félicitant Trudeau pour sa politique annoncée contre les armes d’assaut. Nous expliquions dans un commentaire que nos membres n’ont peut-être pas lu en quoi cela concernait les APLP : « Depuis l’événement féminicide à Polytechnique en 1989, Les Artistes pour la Paix furent impliqués dans l’élaboration d’un contrôle des armes à feu de multiples façons: rappelons la Fondation le Silence des armes initiée par un de nos membres, le peintre et sculpteur Alex Magrini (alors directeur du programme en arts plastiques à l’UQAC, maintenant à Florence en Italie) et présidée par Marie-Claire Séguin, tous deux nommés en 1994 et 95 artistes pour la paix de l’année à cause de leur engagement désintéressé dans cet épineux dossier. Ils ont pu compter sur la collaboration des polices de Montréal, Chicoutimi et Québec, de même que sur des retombées fort médiatisées en Belgique. Grâce à la Fondation, des artistes tels que Michel Goulet offraient de leurs œuvres en échanges contre la remise par des individus d’armes ensuite rendues inopérantes par la police : certaines de ces armes devinrent des œuvres d’art – on se souvient du piano pour la paix offert par Alex Magrini et les Artistes pour la Paix au président Aristide qui en fit un symbole fort de la désintégration de son armée, principalement occupée au trafic de cocaïne.

En collaboration avec l’infatigable Heidi Rathjen graduée de Polytechnique, donc consoeur des victimes, recevant à cette occasion lointaine précédant le règne de Harper, un diplôme d’honneur pour notre travail, nous avons appuyé de bonne foi la mise en vigueur de la loi du ministre libéral Allan Rock, aujourd’hui président émérite de l’Université d’Ottawa (dont il fut longtemps recteur). Nous avions fourni au sénateur et alors président d’honneur des APLP Jean-Louis Roux des éléments du discours qui avait emporté l’adhésion du Sénat à la loi C-68, y compris celle du sénateur conservateur Gérald Beaudoin qui nous avait même rejoints comme membre des Artistes pour la Paix.

Loi C-71, dégradée par Trudeau

L’ancien ministre de la Sécurité publique, Ralph Goodale, a déposé en 2018, le projet de loi C-71, adopté en 2019. Une analyse approfondie par Polysesouvient des règlements proposés suite à son adoption montre que le gouvernement a décidé d’édulcorer davantage une « législation déjà faible, conçue de manière à susciter le moins possible de mécontentement chez les groupes pro-armes, tout en présumant améliorer la sécurité publique ». Par exemple, « la vérification du permis d’un acheteur potentiel par le Directeur des armes à feu n’est plus une option et repose uniquement sur la bonne foi du vendeur, comme avant la loi ; elle est également minée par l’incapacité de détecter la non-conformité » (par exemple, selon notre compréhension, troubles psychiatriques ou violence conjugale par un acheteur potentiel). « L’utilité des registres de vente est compromise par la nécessité pour la police d’obtenir un mandat de perquisition pour y avoir accès, une exigence qui n’existait pas auparavant. Les vérifications des antécédents à vie restent discrétionnaires et ne remédient pas aux failles plus importantes entourant le processus de dépistage, comme les risques connus qui sont rejetés ou ignorés. Enfin, l’autorisation de transporter des armes de poing ne s’applique pas dans 96,5 % des cas, tout en gardant l’échappatoire qui peut être invoquée par toute personne transportant son arme de poing presque n’importe où dans une province. »

Selon Nathalie Provost, survivante du féminicide, « le projet de loi C-71 était déjà bien en deçà de ce qui avait été promis en 2015, et maintenant les règlements proposés diminuent encore plus le peu de bénéfices pour la sécurité publique. C’est une énorme déception pour tous ceux et celles qui se sont battus pendant des mois et des années pour faire adopter cette loi édulcorée. Sécurité publique Canada nous a confirmé que ni la loi ni les règlements proposés ne précisent explicitement les renseignements sur le permis d’un acheteur – s’il y en a – qu’un vendeur devrait fournir à la GRC. C’est exactement ce que souhaitent les groupes pro-armes, soit que le gouvernement détienne le moins d’informations possible sur les transactions concernant les armes non restreintes. Il appert que le lobby pro-armes a obtenu ce qu’il voulait, une fois de plus et, ce, au détriment de la sécurité publique. Selon nous, les paroles du gouvernement Libéral vantant ces mesures sont plus malhonnêtes que jamais. Imaginez ce que peuvent ressentir, après plus de trente ans de batailles, les familles des victimes, les survivants, les témoins du drame de Polytechnique et des autres tueries face à un système qui semble être conçu par des législateurs qui tremblent devant les pressions des groupes pro-armes. Car, finalement, c’est encore une fois le lobby des armes à feu qui sort gagnant. »

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[1] Des familles de Polytechnique accusent Trudeau de les trahir | L’aut’journal