J’apprends avec tristesse le décès de Serge Bouchard. Anthropologue de formation, j’ai pu constater de près l’apport de M. Bouchard au savoir québécois. Un grand intellectuel nous quitte. (Valérie Plante, mairesse de Montréal)

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Parmi les thématiques inlassablement reprises par Serge Bouchard, dont nous regarderons encore le fabuleux documentaire, le moineau sauvage, qui lui est consacré, notons les récits illustrant les femmes remarquables de notre histoire, tandis que son dernier bouquin Un café avec Marie rendait un hommage plus intime quoiqu’universel à sa deuxième compagne défunte, emportée par le cancer en pleine pandémie de COVID-19.

Nous retenons les témoignages émouvants de Michèle Audette, innue comme Jean-Charles Piétacho, chef d’Ekuanitshit : « il a toujours respecté la vision des Innus ».

Le résumé pertinent par la journaliste culturelle du Devoir, Odile Tremblay :

Je lisais cette semaine le recueil de chroniques Un café avec Marie. Et dans ces textes si bien écrits, pétris de références non seulement à la vie et aux deuils de l’auteur septuagénaire, mais à ceux qui l’ont précédé, aux Innus, aux coureurs des bois, aux écrivains, la trame de son existence s’y relie à une humanité plus vaste que son parcours personnel. (…) Ces chroniques-là, mêlées de réflexions sur la beauté, le bonheur fugace, le miroir du moi qui s’ignore, le doute et la peur, n’auraient pu être composées à un âge plus tendre. Ça prenait les amours disparues, les ennuis de santé, les rencontres avec l’ours, les vieux mots oubliés en remontée de mémoire, la lecture de Montaigne et les trajets infinis avec des camionneurs au long cours. « Or, comment se fait-il que, dans un monde où la mémoire individuelle prend une si grande importance, la mémoire collective, elle, soit en si grande perte de vitesse ? » lance-t-il au vent qui passe. Apprendre à écouter les témoins du passé est aussi prolonger sa propre destinée.

Anthropologue remarquable, Serge Bouchard s’est volontairement éloigné de l’institution universitaire pour vivre aux côtés de ses objets d’étude, les camionneurs au long cours, par exemple, sujets de son doctorat, qu’il considérait comme ses frères et sœurs. Il raconte avoir usé sa santé en partageant leur lot de sandwichs et de cafés médiocres, et de sommeils grapillés sur des couchettes massacrant son dos.

Dans notre article de janvier 2018, illustré par cette photo d’une manifestation féministe américaine, nous étions dans la même thématique que celui dénonçant le féminicide de samedi en Afghanistan, des religieux opprimant des femmes.

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Manifestantes américaines du 20 janvier 2018 : vos rosaires hors de mes ovaires; je suis forte, invincible, je suis femme; les droits des femmes sont droits de la personne.

Et nous écrivions :

« Les femmes se sont levées pour dénoncer le président Donald J. Trump qui a multiplié en ces dernières semaines ses tristes exemples de débordements agressifs à tous les niveaux :

  • racialement, il érige des murs et déclare illégaux 200 000 Salvadoriens immigrants « to make America great again » ;
  • environnementalement, il viole les eaux américaines [1] par des forages pétroliers et gaziers et retire les États-Unis de la politique environnementale de la Conférence de Paris
  • militairement, il augmente les sommes accordées aux bombes nucléaires et au budget militaire américain;
  • socialement, il augmente les déductions d’impôt accordées aux plus riches;
  • médicalement, il coupe les assurances qui protègent les plus pauvres et approuve les manifestants de droite de vouloir supprimer l’accès à l’avortement;
  • économiquement, il méprise « les pays de merde », tels Haïti et les pays africains. ETC.

Son influence se transmet au Canada chez la ministre des Affaires étrangères Chrystia Freeland qui permet la vente d’armes à l’Ukraine en dépit des clauses restrictives du Traité sur le commerce des armes (ONU) et chez le ministre de la Défense Harjit Sajjan qui engage des dépenses de 70 milliards de $ pour d’absurdes et coûteux avions de chasse, sans remettre en question le bombardement désastreux par l’OTAN de la Libye (2011).

Et elle s’exerce aussi chez plusieurs Canadiens déséquilibrés : des militaires, accusés de viols et de harcèlements sexistes envers les homosexuels, désertent et joignent les motards criminalisés Hell’s Angels, le lobby pro-armes Tous contre un registre québécois ou le groupe identitaire raciste la Meute. »

Et nous terminions avec :

« le combat de revalorisation des plus humbles continue chez nous, pacifistes et féministes unis : notre co-présidente d’honneur Antonine Maillet a glorifié la sagouine et l’immigrée anarchiste de la guerre d’Espagne, sa femme de ménage madame Perfecta, l’anthropologue Serge Bouchard nous a offert les magnifiques oubliées et un portrait du peuple rieur innu et enfin Samian, APLP2015, dans un rôle d’archéologue, époussette des artéfacts liant les bouts épars de notre histoire créée aussi par des femmes passionnées dans la fresque Hochelaga : terre des âmes de François Girard.

Dans un sommaire de leurs actions, les Artistes pour la Paix résument une série de conférences, rencontres ou spectacles coorganisés par les vice-présidents Dominique Lévesque et Daniel-Jean Primeau en l’année 2008-9 : Serge y figurait parmi nos invités.

  • En 2008-2009, les APLP offrent 25 concerts, événements ou spectacles à l’occasion de leur 25e anniversaire, les Fernand Ouellette (Grand prix Leopold Senghor 2008, premier poète québécois à recevoir cette plus importante distinction), Marie Laberge, Jean-Guy Moreau, Florence K, Samian, Natalie Choquette, Dan Bigras, Richard Séguin, Yvon Deschamps, Judi Richards, Armand Vaillancourt, Annie Roy, Laure Waridel, Raoûl Duguay, Marie-Mai, Serge Bouchard, Claude Lafortune, Nabila ben Youssef, Philippe Laloux, Ève Cournoyer, Yves Desrosiers, Alain Lamontagne, Mariève Maréchal, Symon Henry, Marie-Marine Lévesque, Domlebo, Valéry Latulippe, Geneviève LeBel, Bruno Roy, Coral Egan, Catherine Durand, Sylvie Paquette, Mara Tremblay, Catherine Lavoie, Alexandre Désilets, Daniel Lavoie, Édith Butler, Catherine Major et une trentaine d’autres artistes ont participé à un de ces événements réalisés par les Artistes pour la Paix sans qu’un seul ne trouve la faveur d’être commenté par un journal, à part une exception, La Presse qui en a mentionné un seul, en se gardant de faire allusion à ce qu’il était organisé par les APLP….

 

Nous avons apprécié cette solidarité du grand écrivain et animateur à Radio-Canada.

Une œuvre que notre maniaque du cinéma, Pierre Jasmin, avoue avoir préféré à toutes les autres : aux Éditions de l’Homme (Québecor – répertoire Éléphant), son anthologie préparée avec Marie-Christine Lévesque, sur 60 ans de cinéma québécois : « les images que nous sommes ». Ceux qui ont pu douté de la québécitude de Serge feraient bien de relire comme Pierre l’a fait à quatre reprises ses 27 chapitres illustrés dont il vous donne quelques titres : « les soutanes, l’homo bungalow, la marde, l’hôtel et la boisson, suivi de la petite bouteille brune, l’homme en colère, la danseuse nue, le spaghatte… » Nul n’a mieux saisi l’essence du film québécois populaire, de Michel Brault à Gilles Carle !


[1] C’est ce que le Canada veut continuer à faire avec son pipeline Enbridge menaçant de polluer les eaux du lac Michigan, alors que la gouverneure démocrate du Michigan, Gretchen Whitmer, voudrait faire fermer, si l’appui de Joe Biden se concrétise.