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Le président Trump tout fier de son coup.

On l’a sans doute remarqué, depuis son arrivée au pouvoir, le président Trump cible deux pays qu’il cherche à faire percevoir comme des ennemis, l’Iran et la Russie. La propagande américaine fait son œuvre et mène une campagne continue de dénigrement contre ces deux pays. La conjoncture actuelle démontre les risques d’un conflit majeur latent depuis longtemps entre Israël et l’Iran. La décision américaine de déchirer cet accord sur le nucléaire paraît fort mal avisée.

Pour tenter d’y voir clair, émettons quelques hypothèses :

1La Russie est le plus grand producteur de pétrole au monde. L’Iran fait aussi partie du club des 10 plus grands producteurs de pétrole. L’accès au pétrole pourrait-il être un motif valable pour déstabiliser le régime iranien comme les Américains l’ont fait en Irak et en Libye? Ce faisant, les Américains pourraient, avec l’Arabie Saoudite comme allié, conquérir le contrôle total de l’exploitation du pétrole dans cette région. D’une pierre deux coups, mettre des hommes de paille en poste en Iran permettrait aux investissements américains dans le pétrole de recoloniser ce pays une fois abattu. Actuellement, ce sont surtout les investissements russes et européens dans le pétrole (particulièrement, la multinationale Total associée au groupe chinois CNPC et des entreprises britanniques comme BP et Shell) en Iran qui agacent les Américains. Dans le passé, l’Iran a nationalisé les industries pétrolières en 1951, mais le gouvernement d’alors fut renversé par un coup d’État fomenté par les services secrets américains et britanniques dès 1953. Depuis la révolution islamique, le gouvernement iranien a repris une partie du contrôle de l’exploitation pétrolière, enjeu névralgique qui ne date pas d’hier : en 1995, la multinationale américaine Conoco avait obtenu le feu vert du gouvernement iranien pour entrer dans l’exploitation pétrolière, mais sous la pression du Congrès américain, Bill Clinton émit un décret d’interdiction assorti de sanctions économiques touchant tous les échanges commerciaux avec l’Iran. Depuis, les gouvernements américains successifs ne cessent de traiter l’Iran en paria afin de l’appauvrir et de prendre la population en otage des intérêts américains. Cette stratégie américaine machiavélique a toujours eu comme objectif de reprendre pied en Iran.

2En 1978-1979, lors de la révolution islamique en Iran, le gouvernement iranien a fermé tous les centres d’écoute et les bases militaires américaines en Iran. Cette gifle, les Américains l’ont toujours sur le cœur. Sans compter que l’Iran a réussi à fragiliser l’emprise du géant américain sur la région. Le président Trump aimerait sans doute rebâtir des bases militaires en Iran afin d’encercler encore plus la Russie et de renforce le soutien militaire à Israël. Sa stratégie d’élimination du traité sur les armes nucléaires sous de faux prétextes ne pourrait-elle pas constituer une stratégie pour justifier une attaque éventuelle contre l’Iran afin de reconquérir des avantages perdus ? En somme, mâter l’Iran cache aussi l’objectif d’enlever un « ennemi » des pattes d’Israël et de l’Arabie Saoudite.

3Dans les faits, mentionnait Bernard Hourcade dans Le Monde Diplomatique de février 2018, « en violation des lois internationales, les États-Unis interdisent aux entreprises européennes qui ont des intérêts outre-Atlantique d’investir en Iran ou de commercer avec lui. Ils empêchent ainsi un véritable décollage des relations commerciales avec l’Occident et attisent l’impatience de la population. Les sanctions américaines étant principalement motivées par le soutien de l’Iran au Hezbollah et par son hostilité à Israël.» Ne serait-ce pas une autre stratégie pour tenter de déstabiliser le gouvernement iranien et tenter de bâtir une opposition favorable aux investissements américains ?

Malgré la décision du président Trump, cet accord imparfait sur le nucléaire avait pourtant un avantage : depuis quelques années, il a permis de maintenir un climat de négociation au lieu du climat de guerre dans cette région tellement blessée par des conflits sans fin.

L’avenir nous dira quelle hypothèse a le plus influencé la décision de ce président mal avisé. Quoi qu’il en soit, dans ce type d’enjeu sur la scène mondiale l’exploitation pétrolière reste un secteur névralgique dont il faut tenir compte. L’Iran exporte 2.1 millions de barils de pétrole par jour, il y a là matière à alimenter les foyers de tension et de susciter bien des questionnements. Heureusement, l’Allemagne, l’Italie, la Grande-Bretagne et la France, des investisseurs importants qui maintiennent des échanges commerciaux avec l’Iran ne sont pas des pays tout à fait disposés à briser cet accord sur le nucléaire. Une chose est certaine, la décision du président Trump ajoute une autre dimension au confit entre Israël et l’Iran. Si un conflit armé monte en intensité entre ces vieux ennemis, ce serait tragique pour les deux pays et pour le monde. En un mot, nous sommes encore loin de la paix au Proche-Orient.