Un communiqué des Intellectuels pour la souveraineté, dont l’un des membres était present en Catalogne lors du referendum.

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Photo Radio-Canada

Préserver avec succès l’unité nationale implique de gérer les rapports entre nations majoritaire et minoritaire par le dialogue. À l’opposé, le choix de la répression même en contexte démocratique provoque l’unité chez les minorités revendicatrices. Lorsque le dialogue fonde les rapports entre nations majoritaire et minoritaire, les victoires indépendantistes sont d’autant plus difficiles qu’elles exigent la démonstration de l’existence des rapports de domination. Un éventuel échec du dialogue reste toujours possible, mais il n’invalide pas l’option. Choisir le dialogue, pour une majorité, reste la meilleure voie afin d’éviter la violence et de respecter l’expression démocratique de la minorité. On pourrait considérer que l’Europe et les Nations unies ont la responsabilité morale de pousser les majorités à respecter leurs minorités, notamment le droit à l’autodétermination. Dans cette perspective, le Canada comme bien d’autres Etats, est aux prises avec des rapports minorité/majorité questionnant l’unité nationale et le régime politique. Comme le droit international, son droit intérieur reflète la domination de la majorité canadienne anglaise. Pour les Intellectuels pour la souveraineté du Québec (IPSO), il est impérieux de défendre l’idée d’un stade supérieur de développement démocratique, autant dans le cas Catalogne/Espagne que dans le cas Québec/Canada, ou que dans tout autre cas impliquant une minorité nationaliste vivant en démocratie.

Exiger la primauté du droit à l’autonomie

Nous dénonçons l’intransigeance des dirigeants madrilènes ainsi que leur gestion provocatrice et dangereuse de la question catalane au nom d’un légalisme rigide. Il importe d’en dénoncer les penchants autoritaires afin d’éviter d’éventuels débordements sanglants et d’exiger la primauté du droit des nations minoritaires à choisir leur avenir dans la paix et la sécurité.

Ce droit à l’autonomie ou à l’indépendance, respectueux des droits individuels fondamentaux, doit pouvoir s’exprimer même à l’encontre d’une loi fondamentale, d’une Constitution ou de jugements des tribunaux qui le nient. La position minimale des démocrates catalans (comme la mairesse de Barcelone) est de demander la démission des partisans de la ligne dure au sein du gouvernement espagnol actuel, en tête de file le chef du gouvernement Mariano Rajoy qui ne fut élu qu’avec 33 % des voix aux élections de 2016.

La résistance actuelle de la Catalogne face à l’agression de l’Espagne bénéficierait d’une protection de l’Europe, des Nations unies et de l’opinion publique internationale. Dans nos rapports Québec/Canada, rien ne garantit que notre partenaire serait plus démocratique que l’Espagne.

Pour une minorité, il est particulièrement important que sa quête d’autonomie (ou d’indépendance) se fasse dans un cadre démocratique, à défaut de quoi la répression créerait des conditions de conflits néfastes pour tous. Dans toutes les démocraties «plurinationales», l’atteinte d’un stade supérieur de développement démocratique s’impose. Seul le respect du droit à l’autodétermination garantit la préséance des valeurs universelles de liberté et de fraternité.

Les signataires de cette tribune s’expriment au nom du collectif des Intellectuels pour la souveraineté du Québec (Ipso) : Philippe Bernard(trésorier), Charles Berthelet (membre du conseil d’administration), Michel Blondin (membre du conseil d’administration), Joël Côté (membre du conseil d’administration), Jocelyne Couture (membre du conseil d’administration), Micheline Labelle (vice-présidente), Andrée Lajoie (membre du conseil d’administration), André Jacob (secrétaire), Ercilia Palacio-Quintin (registraire), Jean-René Plante (membre du conseil d’administration) et Pierre Serré(président).

NDLR : ce texte a été publié dans Le Devoir et Le Monde.