Badr sculpte ses œuvres avec les pierres du mont Safoon, près de Lattaquié, en Syrie. Il a avec cette famille de pierres « une relation humaine morale » car, dit-il « ne ressent le malheur des pauvres que celui qui fait partie de leur terre ». Il incarne les populations déplacées. « Mon imagination est sans limites. Je transforme ces pierres en des récits tissés par mon imagination mêlés à l’amertume de la réalité ».

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« Le cri des pauvres dans un temps où toutes les personnes sont devenues de simples chiffres qui attendent la mort ». Les pierres sont des mots pour raconter des histoires.

« Cela commande d’aimer ces pierres, de comprendre leur alphabet… de continuer ensuite et de persister ».

Les travaux de Nizar Ali Badr – près de 2000 œuvres – réalisés ces dernières années représentent ce qui se passe et tout ce qui a mené le pays aujourd’hui vers «l’ignorance».
Ces œuvres ne sont pas destinées à la vente, Nizar Ali Badr a décidé de les garder comme un message aux prochaines générations d’autant qu’il ne termine pas un travail sans que ses « larmes eurent lavé ses pierres de tristesse et de douleur à cause des destructions et du chaos qui règnent ».

« Ces pierres savent crier et leur voix sont plus fortes que les balles ».

badr_2Les conditions de vie dans toutes les villes syriennes sont devenues difficiles mais cela n’est pas une raison suffisante de quitter le pays du point de vue du sculpteur. Et encore moins quitter sa ville de Lattaquié. La Syrie, pour lui, est la plus « pure des terres ».

Ce qui se passe en Syrie ressemble « à une arène de combat de taureaux. Le monde regarde et applaudit. Tout le monde participe à la danse sur le corps des pauvres ».

Badr se décrit lui-même comme un « homme de pierre qui ne s’intéresse qu’à l’amour de la Syrie et œuvre à le marquer dans la pierre. Ces pierres savent crier et leurs voix sont plus fortes que les balles. Malheureusement, chaque fois que je termine une sculpture de pierres assemblées, je dois la détruire, parce que la fixation des pierres avec de la colle spéciale sur des supports spéciaux est devenue beaucoup trop cher de nos jours.  La seule chose que je puisse faire à l’heure actuelle est de prendre des photos de mes œuvres d’art éphémères : ceci est mon moyen de les immortaliser.  Donc, quand je crée une sculpture en pierre, je sais avec certitude qu’il n’y a rien ici pour la retenir. Elle sera, sans nul doute, détruite sous peu de temps, tout comme les mandalas de sable bouddhistes. A cause de cela, il y a un caractère éphémère inhérent à mon travail qui exige une capacité de se détacher des objets matériels et de comprendre la nature temporelle de toutes les choses dans la vie. »

Nizar Ali Bader, sculpteur syrien ugarit : « Mes ancêtres ugarits vivent encore dans mes gènes… Les cris sont sortis de l’utérus de la sainte terre syrienne. Oui ! Les pierres ont crié fort, si fort que tout a retentit… Les cris des nécessiteux, opprimés et fugitifs. C’est un cri contre l’injustice, l’assassinat et l’oppression. C’est aussi le cri des enfants syriens qui réclament leur droit aux études.

Conçues de pierres Safoon, mes œuvres et mes créations sont sans précédent dans ce monde. Elles ont pris naissance d’un cri : oui ; le cri de la pierre qui réclame l’arrêt du massacre.

Comme je suis l’élu de mes ancêtres ugarits, aucun artiste ne pourra réaliser des œuvres en pierres Safoon semblables aux miennes. J’ai créé plus de dix mille œuvres d’art et je continue à le faire pour prouver au monde que l’acharnement et la détermination du syrien est suprême.

Je crée une œuvre avec pour thème principal : les émotions humaines de base. L’amour, l’espoir, le bonheur, la tristesse, la douleur … Des personnes dans le besoin, des opprimées, des fugueurs, des immigrants… Pour décrire la guerre et la migration en Syrie.
Nizar Ali Badr a commencé à créer des œuvres avec ces pierres splendides au début de la guerre en Syrie. Mon seul but est de les laisser aux générations futures. Tous les jours, j’essaye de faire de l’art avec ces pierres dans des conditions matérielles très difficiles. Je n’ai jamais eu des attentes financières. Dès le début, les gens ont découvert mon seul but, dans ma ville natale en Syrie, et ils ont pu voir les œuvres que j’ai réalisées pour les générations futures. La guerre, la destruction, la mort, et au milieu de la migration, les voix des personnes qui souffrent. Mon message aux gens, évidemment, le seul message, est le bonheur partout pour répandre la charité ».